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Il faut distinguer deux situations, d’une part celle de la reconnaissance et de l’exécution en France des décisions étrangères en l’absence de conventions internationales ou de règlements communautaires, d’autre part, celle de la reconnaissance des jugements étrangers dans le cadre des règlements communautaires.

-  En l’absence de conventions internationales ou de règlements communautaires : Le moyen de rendre exécutoire en France une décision rendue par une juridiction étrangère, est la procédure d’exequatur, prévue par l’article 509 du code de procédure civile qui dispose que « les jugements rendus par les tribunaux étrangers et les actes reçus par les officiers étrangers sont exécutoires sur le territoire de la République de la manière et dans les cas prévus par la loi ».

Trois conditions doivent être réunies :
- la décision doit émaner d’une autorité étrangère, c’est-à-dire qu’elle ait été prononcée au nom d’une souveraineté étrangère.,
- l’acte doit être un acte juridictionnel ou assimilé à un tel acte (décisions gracieuses ou contentieuses), il s’agira de tout acte ou décision émanant d’une autorité exerçant une fonction dévolue en France à l’autorité judiciaire,
- l’acte doit statuer en matière de droit privé ; le juge étranger doit avoir statuer sur des intérêts civils ou commerciaux. Les jugements étrangers rendus en matière de droit public sont traditionnellement insusceptibles d’exécution en France.

Ces conditions étant réunies, un jugement étranger peut produire en France différents effets, normatifs et non normatifs. Les plus classiques sont les premiers, au sein desquels on distingue notamment la force exécutoire, l’autorité de la chose jugée et l’efficacité substantielle (celle-ci signifie que le jugement exerce une influence sur le statut juridique des parties, en fixant leur situation juridique ou leurs droits et obligations respectifs).

Dans un arrêt rendu en 1964, la Cour de cassation posait cinq conditions pour que les jugements étrangers soient dotés de l’efficacité normative. Celui-ci énonçait que : « pour accorder l’exequatur , le juge français doit s’assurer que cinq conditions se trouvent remplies, à savoir la compétence du tribunal étranger qui a rendu la décision, la régularité de la procédure suivie devant cette juridiction, l’application de la loi compétente d’après les règles françaises de conflit, la conformité a l’ordre public international et l’absence de toute fraude à la loi, que cette vérification qui suffit à assurer la protection de l’ordre juridique et des intérêts français, objet même de l’institution de l’exequatur, constitue en toute matière à la fois l’expression et la limite du pouvoir de contrôle du juge chargé de rendre exécutoire en France une décision étrangère, sans que ce juge doive procéder à une révision au fond de la décision » .

Toutefois depuis un arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 20 février 2007, ces conditions ont été réduites au nombre de trois. La Cour a énonce que « pour accorder l’exequatur hors de toute convention internationale, le juge français doit s’assurer que trois conditions sont remplies, à savoir la compétence indirecte du juge étranger, fondée sur le rattachement du litige au juge saisi, la conformité à l’ordre public international de fond et de procédure et l’absence de fraude à la loi ; que le juge de l’exequatur n’a donc pas à vérifier que la loi appliquée par le juge étranger est celle désignée par la règle de conflit de lois française ».

La première de ces conditions impose au juge français de s’assurer de « la compétence du tribunal étranger qui a rendu la décision ». Sur ce point, l’arrêt Cornelissen ne dément pas la jurisprudence antérieure de la Cour. C’est dans un arrêt de 1985 Simitch, que la Cour de cassation a apporté des éclaircissements sur ce qu’il fallait entendre par la compétence du juge étranger. A cet égard, elle a décidé que « toutes les fois que la règle française de solution des conflits de juridictions n’attribue pas compétence exclusive aux tribunaux français, le tribunal étranger doit être reconnu compétent si le litige se rattache d’une manière caractérisée au pays dont le juge a été saisi et si le choix de la juridiction n’a pas été frauduleux ».

La deuxième condition impose le respect de l’ordre public international de fond et de procédure. Ainsi le juge français procédant au contrôle de la régularité internationale du jugement étranger doit s’assurer de la régularité de la procédure suivie devant le juge étranger. Cette condition doit s’apprécier « uniquement par rapport à l’ordre public international français et au respect des droits de la défense ». La contrariété à l’ordre public international de procédure d’une décision étrangère ne peut être admise que s’il est démontré que les intérêts d’une partie ont été objectivement compromis par une violation des principes fondamentaux de la procédure.
La troisième condition est relative à l’absence de fraude à la loi, tout comme en matière de conflit de lois, le juge vérifie que les parties n’« ont pas volontairement modifié le rapport de droit dans le seul but de le soustraire à la loi normalement compétente ». Mais depuis l’arrêt du 20 février 2007, le juge n’a plus à vérifier que la loi appliquée par le juge étranger est celle désignée par la règle de conflit de lois française.

En droit communautaire :

Le règlement n° 44/2001/CE du Conseil du 22 décembre 2000, connu également sous le nom de règlement « Bruxelles I », et faisant suite à la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, vise à faciliter la libre circulation des jugements en matière civile et commerciale. Pour qu’une décision rendue par un Etat membre soit exécutoire sur le territoire d’un autre Etat membre, plusieurs conditions doivent être réunies : la décision doit avoir été prononcée par une juridiction d’un Etat membre de l’Union, elle doit nécessairement relever de la matière civile et commerciale. Le règlement s’applique aux décisions passées ou non en force de chose jugée, contentieuses ou gracieuses.
Les points sur lesquels le juge pourra effectuer son contrôle sont limitativement énumérés. Ainsi, il pourra notamment refuser de reconnaître une décision « manifestement contraire à son ordre public ». Le juge national pourra également refuser une décision au motif que celle-ci est inconciliable avec une autre. La CJCE a précisé la notion de « décisions inconciliables », en considérant que celles-ci entraînent « des conséquences juridiques qui s’excluent mutuellement ».

Enfin un dernier point fait exception au principe général posé par le règlement, selon lequel il ne peut être procédé au contrôle de la compétence des juridictions de l’Etat d’origine. En effet le règlement prévoit quelques hypothèses résiduelles, dans lesquelles les décisions ne seront pas reconnues, notamment au regard de l’article 35 §1, si les règles de compétence relatives à la partie faible (consommateur et assuré) n’ont pas été respectées.

Dès lors que les conditions de régularité qu’il prévoit n’ont pas été méconnues, le règlement prévoit que « les décisions rendues dans un Etat membre et qui y sont exécutoires sont mises à exécution dans un autre Etat membre après y avoir été déclarées exécutoires sur requête de toute partie intéressée ». A cet égard, la procédure est relativement simple. L’instance est introduite par requête et est non contradictoire, la Cour de cassation a notamment rappelé que la partie contre laquelle l’exécution est demandée n’a pas à être ni entendue, ni appelée à la procédure. Au cours de cette phase, le juge se contentera de vérifier que la décision est exécutoire dans son Etat membre d’origine et que les exigences de l’article 53 du règlement ont été respectées (la partie invoquant la reconnaissance doit produire une expédition de celle-ci réunissant les conditions nécessaires à son authenticité ainsi qu’un certificat remis par l’Etat d’origine). Après s’être assuré que ces critères sont satisfaits, le juge déclare la décision exécutoire.

Faisant application des articles 2 (règle de compétence générale à savoir le for du domicile du défendeur), et 6§1 (règles de compétences spéciales) du règlement Bruxelles I, applicables en cas de pluralité de défendeurs et fixant la compétence du tribunal du domicile de l’un d’entre eux, la Cour de cassation a approuvé une cour d’appel ayant fait ressortir que les demandes concernées étaient susceptibles d’entraîner des décisions contradictoires si elles étaient jugées séparément et s’inscrivaient dans le cadre d’une situation de fait et de droit unique justifiant l’application des dispositions des articles 2 et 6§1.
En application de l’article 5 § 2 du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, relatif à la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile, le tribunal compétent pour statuer sur la dissolution du lien matrimonial est également compétent pour connaître de la demande de pension alimentaire accessoire.

La notion de « litispendance » au sens de l’article 27§1 du règlement n°44/2001 est une notion autonome devant faire l’objet d’une interprétation extensive a rappelé la Cour de cassation dans son arrêt du 17 janvier 2006, en sanctionnant une cour d’appel pour avoir refusé d’assimiler une action en contrefaçon à une action portant sur la résiliation de conventions et le caractère licite de l’usage par une société des dessins fournis par son cocontractant, dans un litige liant les mêmes parties.

Dans un arrêt du 20 septembre 2006, la Cour de cassation a jugé au sujet de l’article 19 § 2 sous a) du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 qui instaure des règles de compétence spéciales, que ces règles interdisent à l’Etat membre saisi par un salarié d’une demande dirigée contre son employeur domicilié dans un autre Etat membre de se référer à ses propres règles de compétence pour déterminer quelle est la juridiction compétente. Lorsqu’il résulte des constatations des juges du fond que le salarié a exécuté son travail sur différents chantiers en France, dont le dernier était situé dans une ville qui n’était pas celle de son domicile, la cour d’appel ne pouvait se fonder sur les dispositions de l’article R. 517-1 du code du travail pour dire que la juridiction compétente était celle du domicile du salarié.

Le règlement n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale n’a donné lieu qu’à un arrêt de la Cour de cassation française , approuvant la cour d’appel pour avoir retenu qu’il n’appartient pas au juge de l’Etat requis, saisi d’une demande de retour immédiat d’un enfant, de statuer au fond sur la garde de l’enfant ; puis, relevant que l’enfant est né aux Pays-Bas d’un père néerlandais et y a principalement résidé, hormis quelques séjours en France dans sa famille maternelle, pour avoir décidé que l’autorité parentale commune, au sens de l’article 251 du code civil néerlandais, survit au divorce, de sorte que la résidence de l’enfant ne peut être modifiée unilatéralement par la mère avant qu’il ne soit statué au fond ; et ayant constaté que la décision marocaine invoquée ne comportait aucune disposition spécifique relative à une garde exclusive confiée à la mère, pour en avoir déduit justement que le déplacement de l’enfant était illicite au sens de l’article 2-11 du Règlement n° 2201-2003 du 27 novembre 2003.

 
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