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France, Cour de cassation

 


En l’absence de mécanisme donnant compétence interprétative à une juridiction supranationales (CJCE par exemple), les juges , statuant en matière civile, se reconnaissent de manière quasi constante le pouvoir d’interpréter les convention multilatérales. Le principe a été posé par l’arrêt de la Cour de cassation du 24 juin 1839 (“Napier”) fondant les juges à interpréter les traités, pouvoir conditionné par le respect de la compétence des juges telle qu’elle résulte de la séparation des pouvoirs. Le principe a été rarement démenti, il appartient aux juges de l’ordre judiciaire statuant sur l’ensemble des matières civiles d’interpréter les traités invoqués devant eux. Il en va ainsi pour toutes les conventions dites de droit international privé et pour les conventions multilatérales d’entraide judiciaire, de même que les convention multilatérales relatives aux droits de l’homme (l’exemple parfait en étant la Convention européenne des droits de l’Homme).

Parmi les conventions multilatérales interprétées par les tribunaux, on retrouve les conventions du travail, celles relatives au statut des apatrides, la Convention de Genève sur les réfugiés, les conventions multilatérales relatives aux transports internationaux des personnes et des marchandises, les conventions relatives à la protection de la propriété intellectuelle et à la protection littéraire ou artistique [1].

Les dispositions des traités bilatéraux conclus par la France sont également interprétées par les tribunaux judiciaires sans qu’il soit nécessaire - en l’absence d’une interprétation gouvernementale par voie de circulaire - de recourir à l’interprétation du Ministère des Affaires Etrangères. Il en est ainsi pour les conventions dites judiciaires établissant les compétences des juges ainsi que les conventions fiscales lorsque le contentieux relève des tribunaux judiciaires.

Concernant les traités bilatéraux ou multilatéraux de nature politique, les exceptions au principe sont l’ordre public international (les juges du fond “peuvent interpréter les dispositions d’un traité dès lors qu’elles ne mettent pas en cause l’ordre public international” Civ 1., 7 juin 1989, JCP G 1990, II, 21448), ou les questions de droit public international. Ainsi, lorsque des conventions mettent en oeuvre des intérêts privés, elles relèvent de l’interprétation des juges, et celles dont l’interprétation soulève des questions d’ordre public international ou de droit international public reviennent au gouvernement. En ce cas, c’est normalement le Ministère des Affaires, saisi par la Chancellerie, qui répond par voie de lettre ou de dépêche à la question préjudicielle posée par le tribunal ou la Cour. Cela peut être également un ministère spécialisé selon le domaine concerné.

Le Conseil d’État s’est reconnu le premier en 1990 le pouvoir d’interpréter lui-même un traité diplomatique ( CE 22 juin 1990). La première Chambre civile l’a suivi, sans équivoque (“il est de l’office du juge d’interpréter les traités internationaux (...) sans qu’il soit nécessaire de solliciter l’avis d’une autorité non juridictionnelle” Civ 1., 19 décembre 1995). La Chambre criminelle renvoie quand à elle à l’interprétation gouvernementale, les “traités sont des actes de haute administration qui ne peuvent être interprétés, s’il y a lieu, que par les puissances entre lesquelles ils sont intervenus” (jurisprudence constante depuis le 27 juillet 1877, et notamment les affaires Touvier, Barbie et Boudarel). Ainsi, par exemple, la Chambre criminelle, le 3 juin 1985, a jugé que “les conventions diplomatiques sont des actes de haute administration qui ne peuvent être interprétées, s’il y a lieu, que par les puissances entre lesquelles elles sont intervenues. Dès lors que la Cour d’appel constatait, et la divergence des parties sur le sens à donner à certaines clauses de la convention internationale du 18 mai 1956, et l’ambiguïté de certains articles de ce traité, elle excédait ses pouvoirs en l’interprétant. Elle était tenue, en effet, de surseoir à statuer jusqu’à ce que le Gouvernement français, qu’il lui appartenait de consulter à ce sujet, ait officiellement interprété les clauses litigieuses de la convention” ( Crim. 3 juin 1985, Bulletin criminel 1985 n° 212).

En revanche, lorsque ne sont pas en cause des questions de droit international public, la Cour de cassation confirme les décisions des juges du fond interprétant eux-mêmes les traités.

Précision est apportée que depuis les arrêts Beaumartin (CEDH, 24 novembre 1994, Beaumartin contre France, série A, n° 296-B) et Chevrol (13 février 2003), le fait de solliciter un avis du Ministère des Affaires Etrangères reste possible mais cet avis ne peut et ne doit pas lier le juge dans l’interprétation de la Convention.

[1Cf Jurisclasseur Droit international, fascicules 12-5

 
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