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France, Cour de cassation

 


1) En quoi la question se posait de façon nouvelle ?

En dehors de la question du remboursement, par les organismes de sécurité sociale, des frais engagés à l’occasion d’actes de procréation médicalement assistée [1] la Cour de cassation a eu à connaître de la fécondation in vitro de manière nouvelle au sujet du devenir d’embryons congelés en cas de dissolution du couple ; elle a jugé [2], sur ce point :

- que la loi du 17 janvier 1975 relative à l’interruption volontaire de grossesse (notamment son article 1er qui garantit le respect de l’être humain dès le commencement de la vie et précise qu’il ne peut y être porté atteinte qu’en cas de nécessité [3]) n’était pas applicable dans le cas du refus de l’implantation d’embryons ;

- qu’avant même l’entrée en vigueur de l’article L. 152-2 du Code de la santé publique [4] issu de la loi du 29 juillet 1994, l’assistance médicale à la procréation ne pouvait avoir pour but légitime que de donner naissance à un enfant au sein d’une famille constituée, ce qui exclut le recours à un processus de fécondation in vitro ou sa poursuite lorsque le couple qui devait accueillir l’enfant a été dissout par la mort du mari avant que l’implantation des embryons, dernière étape de ce processus, ait été réalisée ;

- qu’il résultait de l’article 9 de la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 que les embryons existant à la date de la promulgation de la loi, qui satisfaisaient aux règles de sécurité sanitaire en vigueur au jour de leur transfert, pourraient être confiés à un couple remplissant les conditions prévues à l’article L. 152-5 du Code de la santé publique [5], et que si leur accueil était impossible, et si la durée de leur conservation était au moins égale à cinq ans, il était mis fin à cette conservation.

2) Comment la solution retenue s’articulait avec les textes existants ?

Solution praeter legem
Solution contra legem
Création prétorienne

En jugeant que le but légitime de l’assistance médicale à la procréation (donner naissance à une enfant au sein d’une famille constituée), excluait le recours à un processus de fécondation in vitro ou sa poursuite lorsque le couple qui devait accueillir l’enfant avait été dissout par la mort du mari avant que l’implantation des embryons, dernière étape de ce processus, ait été réalisée, la Cour de cassation a fait oeuvre de création prétorienne ; le législateur est allé dans le même sens, qui a ensuite prévu [6] que :

L’assistance médicale à la procréation est destinée à répondre à la demande parentale d’un couple.

Elle a pour objet de remédier à l’infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement diagnostiqué. Elle peut aussi avoir pour objet d’éviter la transmission à l’enfant d’une maladie d’une particulière gravité.

L’homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer, mariés ou en mesure d’apporter la preuve d’une vie commune d’au moins deux ans et consentant préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination.

3) “Origine” des textes en cause

Norme purement nationale
Norme d’origine régionale
Norme d’origine internationale

La loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 est une norme purement nationale, même si les difficultés éthiques posés par le devenir d’embryons congelés postérieurement à la dissolution d’un couple se sont évidemment posées dans de nombreux pays ; elle a été adoptée après consultation du Comité consultatif national d’éthique (cf notamment l’Avis sur le transfert d’embryons après décès du conjoint (ou du concubin) - 17 décembre 1993) [7]].

4) Si la question avait fait l’objet d’un contentieux important dans de nombreux litiges

Les litiges ont été peu nombreux mais ont eu un fort retentissement médiatique.

5) Si la question avait divisé les juges du fond

La question n’a pas véritablement divisé les juges du fond.

6) Comment la solution a-t-elle été reçue ?

a) A-t-elle été connue du grand public et si oui fait l’objet de débats ?

L’ensemble des questions de bioéthique ont donné lieu à des débats auxquels les autorités morales et religieuses ont parfois pris part ; ces débats avaient davantage pour objet de nourrir la réflexion préalable à l’adoption de la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 que de réagir aux décisions jurisprudentielles.

b) Comment a-t-elle été accueillie par les milieux professionnels concernés ?

Réactions médiatiques et lobbies
Conséquences sur les pratiques
Conséquences économiques

La loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 (et donc la position de la Cour de cassation reprise par cette loi) ont été plutôt favorablement accueillies par les milieux professionnels, dont elles légitimaient les pratiques.

c) Comment a-t-elle été accueillie par la doctrine spécialisée ?

La jurisprudence de la Cour de cassation a été favorablement accueillie par la doctrine spécialisée.

d) Quelle influence a-t-elle pu avoir sur le législateur national ?

Aucune

- Parce que la question n’appelait pas d’intervention législative ou réglementaire
- Parce que les esprits ne paraissaient pas mûrs pour une telle intervention
- Parce qu’une intervention risquait de figer le droit
- Parce qu’il a paru opportun de s’en remettre à la sagesse des juges

- Perçue comme un arrêt de provocation, elle a été suivie d’une réforme - législative ou réglementaire

- Rejetant la solution jurisprudentielle
- Reprenant la solution jurisprudentielle
- Amendant la solution jurisprudentielle

- Le législateur a repris la solution jurisprudentielle (cf supra).

Mères porteuses

1) En quoi la question se posait de façon nouvelle ?

La question soumise à la Cour de cassation se posait de façon nouvelle en ce qu’était contestée la conformité aux principes d’ordre public de l’indisponibilité du corps humain et de l’état des personnes de la convention par laquelle une femme s’engage, fût-ce à titre gratuit, à concevoir et à porter un enfant pour l’abandonner à sa naissance. La Cour de cassation a jugé qu’une telle convention contrevenait à ces principes [8].

2) Comment la solution retenue s’articulait avec les textes existants ?

- Solution praeter legem
- Solution contra legem
- Création prétorienne

La décision rendue - arrêt de cassation - l’a été au visa des articles 6 et 1128 du Code civil [9], qui disposent respectivement qu’

On ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes moeurs et qu’il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l’objet des conventions.

3) “Origine” des textes en cause

- Norme purement nationale
- Norme d’origine régionale
- Norme d’origine internationale

Ces deux textes sont des normes nationales.

4) Si la question avait fait l’objet d’un contentieux important dans de nombreux litiges

La question n’a pas fait l’objet d’un contentieux abondant.

5) Si la question avait divisé les juges du fond

Il n’y a pas eu de division des juges du fond sur cette question.

6) Comment la solution a-t-elle été reçue ?

a) A-t-elle été connue du grand public et si oui fait l’objet de débats ?

Au delà de la décision, le débat a été surtout un débat d’ordre éthique sur la pratique des mères porteuses.

b) Comment a-t-elle été accueillie par les milieux professionnels concernés ?

- Réactions médiatiques et lobbies
- Conséquences sur les pratiques
- Conséquences économiques

La solution de la Cour de cassation a été bien accueillie par les milieux professionnels concernés.

c) Comment a-t-elle été accueillie par la doctrine spécialisée ?

Il a été relevé que cette jurisprudence ne manquait pas d’ambiguïté, compte tenu notamment de l’absence d’équivalence entre la notion d’indisponibilité et l’article 1128 du Code civil, compte tenu aussi de l’absence de définition claire de la notion de corps, l’arrêt ne permettant pas de dire si la Cour avait jugé que le corps n’était pas une chose, ou s’il était une chose hors du commerce [10].

d) Quelle influence a-t-elle pu avoir sur le législateur national ?

Aucune

- Parce que la question n’appelait pas d’intervention législative ou réglementaire
- Parce que les esprits ne paraissaient pas mûrs pour une telle intervention
- Parce qu’une intervention risquait de figer le droit
- Parce qu’il a paru opportun de s’en remettre à la sagesse des juges

- Perçue comme un arrêt de provocation, elle a été suivie d’une réforme législative ou réglementaire

- Rejetant la solution jurisprudentielle
- Reprenant la solution jurisprudentielle
- Amendant la solution jurisprudentielle

Les articles 16 à 16-9 du Code civil, issus de la loi n° 94-653 du 29 juillet 1994, reprennent la solution dégagée par la jurisprudence.

7) Enfin, il va de soi que les personnes qui répondront au questionnaire ont la liberté d’évoquer, dans les différents thèmes, d’autres hypothèses que celles évoquées.

Clonage

Dans un arrêt du 19 décembre 2000, la chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé d’une part qu’

une cour d’appel avait légalement justifié sa décision de rejet de la demande d’annulation d’une revendication inscrite dans un brevet déposé, en retenant que l’objet même de l’invention visée par cette revendication consistait en ce que le produit, qui y était défini, permettait d’exprimer une hormone de croissance humain “pure” sans conjugaison avec une autre d’autre part qu’ une cour d’appel avait exercé, en la motivant, son appréciation souveraine de l’activité inventive du procédé de construction du produit, et du produit lui-même, objet de la revendication litigieuse, en constatant que, pour le définir et entreprendre sa réalisation, il avait fallu aller outre le préjugé conduisant les chercheurs à produire une protéine au moyen de plasmide exprimant cette protéine sous forme conjuguée à une protéine étrangère [11].

Cet arrêt, le seul intéressant directement le procédé du “clonage”, n’est pas suffisamment caractéristique pour qu’il puisse être utilement répondu aux questions mentionnées supra.

[1Cf notamment Soc., 19 octobre 2000, pourvoi n° 99-11.645.

[2Civ. 1, 9 janvier 1996, Bull., I, n° 21, p. 13.

[3Cf aujourd’hui les articles 16 du Code civil, L. 2211-1 et L. 2211-2 du Code de la santé publique.

[4Cf aujourd’hui l’article L. 2141-2 du Code de la santé publique.

[5Cf aujourd’hui les articles L. 2141-5 et L. 2141-11 du Code de la santé publique.

[6Article L. 152-2 du Code de la santé publique, aujourd’hui abrogé (cf article L. 2141-2 du Code de la santé publique).

[8Ass. Plén., 31 mai 1991, Bull., Ass. Plén., n° 4, p. 5.

[9L’arrêt a également été rendu au visa de l’article 353 du Code civil relatif à l’adoption

[10Cf Dominique Fenouillet, in Jurisclasseur Civil (Code), fascicule 12, Respect et protection du corps humain.

[11Com., 19 décembre 2000, Bull., IV, n° 196, p. 171.

 
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