Renforcer l'entraide, la coopération
et la solidarité entre les institutions judiciaires

A propos

L’AHJUCAF est une association qui comprend cinquante cours judiciaires suprêmes francophones.

Elle a pour objectif de renforcer la coopération entre institutions judiciaires, notamment par des actions de formation et des missions d’expertise.

PRIX DE l’AHJUCAF POUR LA PROMOTION DU DROIT
L’AHJUCAF (Association des hautes juridictions de cassation ayant en partage l’usage du français) crée un prix destiné à récompenser l’auteur d’un ouvrage, d’une thèse ou d’une recherche, écrit ou traduit en français, sur une thématique juridique ou judiciaire, intéressant le fond du droit ou les missions, l’activité, la jurisprudence, l’histoire d’une ou de plusieurs hautes juridictions membres de l’AHJUCAF.

La jurisprudence des cours suprêmes

Juricaf

Partenaires

1 1 1
 

Les protections personnelles

 

Monsieur Saâd MOUMMI

Président de chambre à la Cour suprême du Maroc, membre du cabinet du premier président


L’indépendance de la justice
Télécharger l'ouvrage au format PDF


JPEG - 46.9 ko
Monsieur Saâd Moummi

Monsieur le Premier Président de la Cour de Cassation du Sénégal et Président de notre association ;
Monsieur le Premier Président de la Cour Suprême du Royaume du Maroc,
Chers collègues, chers amis ;
Mesdames et Messieurs.

Je suis heureux de me retrouver parmi vous à la fois invité à présenter ce dernier rapport introductif, au 2ème colloque triennal de l’AHJUCAF ; et aussi invité à y représenter l’Institution à laquelle j’appartiens, la Cour Suprême du Royaume du Maroc.

Au début de cette communication, je me dois de joindre mes remerciements à ceux qui ont déjà été formulés de façon éloquente à Monsieur le Premier Président Papa Oumar SAKHO, et au gouvernement de la République du Sénégal, pour la chaleur et l’amitié de leur accueil qui nous a permis d’être présents ici pour ces quelques jours.

Je voulais également remercier, à mon tour les honorables Messieurs Guy CANIVET Premier Président honoraire de la Cour de Cassation de France, et son successeur Vincent LAMANDA Premier Président de ladite Cour, qui ont su – grâce aux importants travaux de Secrétariat Général de notre Association qu’ils ont assumés – nous faciliter la tâche, pour nous permettre d’arriver à DAKAR, et d’assurer le soutien nécessaire de nos activités.

Ce matin, je vais en quelques minutes aborder avec vous, ce sous- thème des protections personnelles du juge. Thème peut être compris de bien des façons, mais il traite avant tout des garanties contre tous les pouvoirs, de droit et de fait, qui peuvent affecter l’indépendance du juge, et de la façon dont nos pays se protègent de tels risques.

C’est donc tout le problème d’un dialogue sans doute nécessaire mais à haut risque entre l’ordre judiciaire et la société (civile) à travers toutes ses composantes pour ne pas enfermer le juge dans sa tour d’ivoire. Les protections personnelles du juge, garantes de son indépendance, s’articulent autour des différents moments de la carrière du juge, mis en évidence dans le questionnaire préparé par notre comité scientifique. Elles peuvent être regroupées selon qu’elles encadrent un déroulement normal de la carrière d’un juge d’une part ; et selon qu’elles traitent et encadrent les moments difficiles dans cette carrière d’autre part, lorsque l’indépendance et l’impartialité personnelle du juge sont mises en cause.

D’où les deux parties que j’ai choisi d’aborder :
- Les garanties d’un bon déroulement de la carrière du juge.
- Les garanties devant encadrer les accidents qui peuvent venir perturber ou affecter la carrière du juge, recouvrant pour l’essentiel les questions de mise en œuvre de la responsabilité des magistrats et le rôle joué par la déontologie.

Malheureusement, le temps qui m’était imparti pour ce travail ne me permettait pas d’atteindre l’exhaustivité, à laquelle pourtant, je me serais volontiers astreint pour rendre compte de toute la richesse des rapports des délégations nationales.

Je tiens à remercier celles-ci pour l’excellent travail qu’elles ont fourni, même s’il m’a été impossible, dans le cadre restreint d’un rapport écrit, de mentionner chacune d’entre elles dans tous leurs détails, et encore moins de le faire aujourd’hui devant vous, où je ne dispose que de quelques minutes. Je ne doute pas néanmoins que nos discussions restitueront cette richesse.
Ces travaux que je vous incite vivement à lire si vous ne l’avez pas déjà fait, soulignent la valeur réelle du dialogue qui existe entre nous, au sein de notre association, et plus globalement dans l’ordre judiciaire.

Les rapports nationaux montrent comment l’organisation des différents aspects de la carrière exprime un fonds commun de pensée qui n’empêche un certain nombre de diversités dans les solutions concrètes adoptées. Une diversité qu’il nous appartiendra d’approfondir et de préciser, de discuter au cours des prochaines heures.

L’indépendance du judiciaire (parfois pouvoir, parfois autorité) se situe au fondement de l’Etat de droit et garantit non seulement une justice égale pour tous, mais la suprématie du droit sur le pouvoir. Il s’agit d’assurer l’autonomie institutionnelle des tribunaux par la séparation des pouvoirs en écartant toute subordination des tribunaux, mais aussi des juges pris individuellement à l’égard de quelque autre pouvoir que ce soit. Cet idéal commence dans les règles qui organisent le la carrière du juge.

I. Les garanties personnelles d’un bon déroulement de la carrière du juge

Ces garanties seront prises dans un ordre chronologique, interrogeant les modes d’entrée dans la magistrature, les processus de formation, les règles d’avancement dans la carrière, et enfin la seule contre partie financière qui puisse être reçue par le juge, c’est-à-dire le traitement.

a) Les premiers pas dans la magistrature

Un bon départ est essentiel à une bonne carrière. Les règles de sélection et de nomination des juges doivent ainsi assurer un recrutement digne de la garantie d’indépendance dont jouissent les citoyens lorsqu’ils recourent à nos tribunaux. Les rapports nationaux illustrent une certaine diversité dans les solutions retenues pour cette entrée dans la magistrature.

Notre tradition commune s’illustre par une voie de recrutement privilégiée : celle du concours ouvert aux jeunes diplômés (avec quelques ouvertures de plus en plus fréquentes pour d’autres compétences, notamment dans les recrutements à mi-carrière). Le cas du Canada où une expérience judiciaire préalable est primordiale demeure singulièrement différent du reste de nos pays.

Ces processus de recrutement par concours sont, selon les pays, plus ou moins indépendants du Ministère de la justice. Dans beaucoup de pays, il est question d’un système où les juges sont nommés au terme d’un double concours : d’entrée et de sortie, où les qualités appréciées ne sont pas les mêmes, une période de formation étant intervenue entre temps.
Les cas de la Hongrie, de la Pologne, de la République Tchèque - méritent une attention particulière car il s’agit plus d’un recrutement par sélection que par concours. La Hongrie par exemple connaît un système où n’intervient à aucun stade le Ministère de la Justice.
Concours ou processus de sélection ? Les mérites comparés des deux systèmes pourront être discutés tout à l’heure.

b) Les conditions de la formation

La formation des magistrats organisée par les droits nationaux, semble s’exercer avec une certaine constance, le modèle de l’école de la magistrature (parfois commune avec les greffes) gagnant un nombre croissant de pays. Ces écoles ou initiatives de formation proposent un contenu à la fois théorique et pratique, d’abord en formation initiale à la prise de fonction, ensuite continue, et qui concerne à la fois les juges et les procureurs pour les pays qui reconnaissent l’unicité du corps judiciaire.

Cette formation, garante d’un esprit imprégné d’une véritable culture d’indépendance existe donc presque partout après leur recrutement par voie de concours : c’est le cas en Belgique, au Bénin, au Burkina Faso, en Égypte, au Liban, au Maroc au Togo – certains cas comme l’Albanie restent toutefois différent -, ou par voie de sélection comme c’est le cas en Hongrie, en Moldavie, en Pologne en Tchéquie, et au Rwanda.

Le cas de la Suisse appelle certains commentaires. Les juges suivent pendant une certaine durée qui varie d’un canton à l’autre, une formation professionnelle qui englobe un programme initial et un autre de perfectionnement ; cette formation théorique est suivie ou alternée par des stages pratiques au sein des juridictions ou de tout autre administration. Les cas de la Belgique, de la France, et de la Hongrie méritent sans doute d’être examinés en détails lors de nos discussions.

Une question traverse nos rapports nationaux qui soit commune au processus de recrutement et à la formation et sur laquelle nous reviendrons sans doute : il s’agit de la place plus ou moins importante (parfois inexistante) accordée au Ministère de la justice dans ces processus, et de l’impact que cette situation peut avoir sur la garantie d’indépendance personnelle du juge.

Pour la formation, illustrée par la diversité des solutions présentées dans les rapports, se pose aussi la question des contenus, et de son caractère obligatoire ou pas (je pense à la formation continue, gage de compétence et d’indépendance vis-à-vis des parties… parfois très spécialisées dans la matière du litige).

c) La promotion dans la carrière

Qui dit magistrature de carrière, dit avancée dans la carrière. Ici encore, le système canadien se distingue de tous les autres puisqu’on n’y fait pas à proprement parler carrière. Mais même parmi nos magistratures de carrière, on remarque que les solutions de possibilité et de gestion de carrière dont il convient qu’elles protègent l’indépendance du juge, varient largement d’un pays à l’autre ; certains systèmes par ailleurs, n’ont pas encore organisé de façon rigoureuse le déroulement de la carrière du magistrat, comme au Bénin par exemple, et nous saurons sans doute pour quelles raisons et avec quels effets dans notre discussion.
L’ensemble des processus de carrière concernent tous les juges, et chaque juge dans ses possibilités d’évolutions, des tribunaux de première instance aux cours suprêmes et de cassation, en passant par les cours d’appel.

J’ai relevé des traits communs dans les règles qui régissent la promotion des juges : à l’ancienneté dans la fonction et dans le grade, et selon les compétences et mérites aussi bien professionnels que personnels du magistrat. Ce système est parfois géré par le Ministère de la Justice, qui concentre les dossiers, procède à la notation par évaluation desdits compétences et mérites du candidat. C’est une hypothèse qui, sans doute méritera discussion, avec cette question qui traverse toutes les contributions : celle de savoir la place que joue les acteurs institutionnels (ministères, chefs de cours et de juridictions, conseils supérieurs de la magistrature, cours suprêmes) dans le mécanisme de promotion, et l’impact que ces solutions offrent en matière de garantie d’indépendance. Quelle place s’il en faut une pour le Ministère de la Justice ? L’indépendance est-elle mieux garantie lorsqu’une autorité elle-même indépendante, un conseil supérieur ou une cour suprême, gérant de a à z le processus de carrière ? Quels critères doivent guider les avancements ?

Autre question qui divise nos pays en deux catégories : l’indépendance, est-elle mieux garantie dans les systèmes qui séparent la fonction du grade ? Qui peut reprocher à un juge de voir son traitement s’améliorer au cours de sa carrière ? Pour autant, cela doit-il se faire au prix de son indépendance, de sa sérénité ? Dans certains pays, le grade ne peut pas être séparé de la fonction comme c’est le cas en Albanie, en France, à Madagascar, au Niger, au Sénégal, et au Tchad.

Enfin, l’examen des rapports nationaux nous enseigne que dans certains pays une précaution supplémentaire est prise consistant à ce que les promotions ne s’obtiennent qu’avec l’accord des juges, que d’autres sont rendues nécessaires en raison de nécessités de service, ou obéissent à des régimes dérogatoires comme certaines limitations temporelles. Le cas de la République Tchèque pourrait servir de base de nos discussions.

d) Le traitement

Les modalités de rémunération des juges varient considérablement d’un pays à l’autre en fonction, du rang, du grade et de l’ancienneté du magistrat. La rémunération fixée par la loi peut connaître des majorations périodiques ainsi que des suppléments ou indemnités. Les différences sont parfois minimes, parfois énormes entre un juge au début de sa carrière, et un magistrat en fin de carrière ; comme elles le sont également d’un pays à l’autre.

L’étude des rapports nationaux montre donc une diversité des traitements réservés aux juges dans nos différents pays, ce qui n’est pas surprenant compte tenu de la différence des salaires qu’on y trouve en général. Il est sans doute inutile d’insister sur le caractère essentiel que représente une garantie de paiement, et à un nouveau suffisant, des juges pour assurer leur indépendance vis-à-vis des parties. On pourra revenir en détail sur cette diversité et leur caractère satisfaisant ou pas.

Encore faut-il aller plus loin dans le questionnement : le niveau suffisant de traitement doit-il être déterminé selon des seuls critères locaux (permettant des variations importantes) ou en tenant compte aussi de l’internationalisation du crime (et de ses moyens de pression sur nos territoires) ? Faut-il penser à établir un standard international ou simplement des fourchettes ? Nous aurons l’occasion d’en discuter.

Toutes ces solutions sur les modalités de recrutement, les possibilités de formation, les modalités d’affectation à de nouveaux postes, ou de salaire peuvent-ils avoir un impact négatif sur l’indépendance de la justice ? Je trouve la question fort intéressante et la réponse suffisamment problématique. Nous y reviendrons.

Avant de passer à notre deuxième axe sur les garanties d’indépendance face aux accidents de carrière, il convient de s’arrêter sur la place particulière qu’occupe la déontologie et son rôle dans la garantie de l’indépendance personnelle du juge. Nous la traiterons pour l’essentiel dans cette deuxième partie relative aux accidents de carrière, c’est-à-dire des protections que le juge doit bénéficier lorsqu’un écart de conduite lui est reproché.
Notons cependant le cas du Canada pour qui la question déontologique aurait pu tout aussi bien (peut-être même plus) figurer dans la partie qui s’achève sur les garanties d’un déroulement normal d’une bonne carrière. En effet, le canada a délibérément choisi de traiter la déontologie dans son côté positif : expression d’une bonne conduite, comme un idéal professionnel à atteindre, un guide pour le juge – et non comme souvent, un ensemble de règles juridiquement sanctionnées.

II-Garantir l’indépendance personnelle du juge à l’occasion des accidents dans la carrière

Cette garantie pose un ensemble de défi à nos magistratures que l’on retrouve diversement exprimée dans nos rapports nationaux. Un juge indépendant doit-il être responsable ? De quoi, et comment ? Quelles sont les garanties procédurales essentielles si un juge doit être mis en cause, afin de protéger son indépendance ? Quelle mise en forme de la déontologie convient le mieux à une magistrature indépendante dans une société démocratique ?

a) La responsabilité des juges

On constate d’abord que la quasi-totalité des rapports nationaux connaissent des régimes de responsabilité parfois civil, parfois pénal parfois, disciplinaire ou encore une combinaison de ceux-ci. Le Canada se distingue encore des autres pays avec la pratique d’une possibilité de révocation très rare par le Parlement, et tout un processus préalable de traitement des inconduites judiciaires, mais pas de régime de responsabilité au sens strict.

Les cas de l’Albanie où le juge n’est pas responsable civilement, mais seulement pénalement dans l’hypothèse où il aurait rendu une décision manifestement injuste est de tout autre nature. La Belgique, le Burkina Faso, la France, Haïti, le Mali, le Maroc, la Mauritanie, la Pologne, la Roumanie, le Rwanda, le Sénégal prévoient des régimes de responsabilité à la fois civile (parfois sous le mécanisme de la prise à partie), pénale et disciplinaire méritent toute notre attention. Notons que de leur côté la Bulgarie, l’Ile Maurice, et la Pologne retiennent la règle du bénéfice de l’immunité du magistrat. Diversité des situations, donc, mais des questions en suspens pour notre discussion : jusqu’où le magistrat doit-il être responsable et selon quelles modalités ?

b) Les modalités de mise en cause d’un juge

Une mise en cause directe du magistrat, est-elle de nature à porter atteinte à son indépendance ? On peut le penser, et c’est pourquoi de nombreux pays ont instauré des verrous. S’agissant de l’appel en responsabilité civile par exemple, un système de responsabilité de l’Etat pour disfonctionnement de la Justice est souvent mis en avant comme écran de protection du juge, avec la possibilité d’une action récursoire contre le juge de la part de l’Etat. Ce système (parfois une hypothèse d’école comme en France où l’action récursoire de l’Etat n’a jamais été mise en œuvre) est-il entièrement satisfaisant ? Faut-il lui préférer un autre type de mise en œuvre, offrant de meilleures garanties ?

Les dispositions légales et réglementaires relatives à la notion de faute disciplinaire et aux sanctions qui lui sont applicables, contenues dans les rapports nationaux présentent des caractères communs. S’agissant de la poursuite disciplinaire, le jeu des acteurs responsables du déclenchement des poursuites, des enquêtes et du jugement est essentiel avec cette même idée qui parcourt nos rapports qu’une indépendance dans ces processus est aussi garante de l’indépendance personnelle du juge. Notons sur cette même responsabilité disciplinaire, une diversité des spectres de définition de l’infraction, parfois très (trop ?) précise, parfois très floue comme en France… Qu’est ce exactement qu’un manquement aux devoirs des magistrats ? Dans quel cas l’indépendance du juge est-elle mieux garantie ?

c) La déontologie

La déontologie des magistrats est l’un de ces points loin de faire l’unanimité, en termes de pratiques, entre nos pays. Une première catégorie de pays déclare connaître et appliquer un code de déontologie qui regroupe des règles relatives à l’éthique du magistrat ; c’est le cas de l’Albanie qui dispose en plus du code d’éthique du juge, d’un code d’éthique du procureur (et d’un 3ème pour les avocats). On trouve aussi des codes en Bulgarie, en Hongrie, sur l’Ile Maurice, en République Tchèque et en Roumanie.

A côté, une seconde catégorie de pays ne dispose d’aucun code, même entendu largement (car encore faudrait-il préciser ce qu’il faut entendre par code), mais d’une référence unique et souvent peu diserte aux dispositions législatives contenues soit dans le statut fondamental de la Magistrature soit hors ce statut dans les lois organisant la poursuite disciplinaire, ou encore, ici et là, dans les lois de procédure.

Code ou pas code ? Nous aurons sans doute à répondre à cette question dans notre discussion. S’agit-il d’un instrument de contrôle ou de perfectionnement ? Par qui doit-il être rédigé (des associations de juges comme pour de nombreux pays ici) ? Doit-il être juridiquement sanctionné. La diversité des solutions ici constatées et l’ambiguïté même de l’objectif poursuivi par un tel instrument de quelque nature qu’il soit montre que l’équilibre n’est pas facile à atteindre pour faire d’un juge un acteur indépendant et néanmoins responsable.

En France, par exemple, le Conseil Supérieur de la Magistrature, dans son avis du 2 octobre 2003, s’est prononcé contre l’élaboration d’un code de déontologie. Les canadiens connaissent des principes déontologiques (et non un code), sans portée disciplinaire. Ces deux pays se retrouvent sur la nécessité de pouvoir saisir une autorité pour avis, quand les juges rencontrent des difficultés d’ordre déontologique, ce qui promeut la déontologie comme outil de garantie d’indépendance et non plus de mise en cause. Là encore convient-il de trouver la bonne autorité ; et le système français, au contraire du système canadien, de ne pas s’être encore prononcé sur ce point.

Quant au contenu, ne pensez pas trouver de position uniforme sur la bonne distance à tenir par le juge dans sa vie sociale, pour garantir son indépendance. A part quelques constantes familiales ou économiques, il ya une diversité de solutions admises dans nos systèmes, ce qui pose question.

J’ai donc pu constater la marque de cultures et de traditions juridiques différentes. Celles de l’Albanie, du Sénégal ou du Maroc, en matière de déontologie ne sont pas tout à fait les mêmes que celles du Canada ou de la Suisse, c’est vrai ; Mais au moment où il me faut conclure cette trop rapide présentation, je dois aussi vous dire que j’ai pu constater un certain mouvement, constater que quelque chose était en marche que je qualifierais de dialogue. Un dialogue de plus en plus présent, dans les processus d’élaboration d’instruments déontologiques par exemple ou de gestion des carrières, où chacun est à l’affût des réussites de son voisin. Un dialogue du français et de l’anglais en particulier qui n’est pas sans me rappeler notre propre dialogue de l’arabe et du français, que nous voulons ouvert à l’un et à l’autre. C’est d’ailleurs ce qui nous pousse aujourd’hui à échanger sur ce sujet important pour repartir chacun dans nos pays, plus riche d’idées et de solutions concrètes sachant garantir l’indispensable indépendance personnelle du juge.

 
  • Facebook
  • RSS Feed