Renforcer l'entraide, la coopération
et la solidarité entre les institutions judiciaires

A propos

L’AHJUCAF est une association qui comprend cinquante cours judiciaires suprêmes francophones.

Elle a pour objectif de renforcer la coopération entre institutions judiciaires, notamment par des actions de formation et des missions d’expertise.

PRIX DE l’AHJUCAF POUR LA PROMOTION DU DROIT
L’AHJUCAF (Association des hautes juridictions de cassation ayant en partage l’usage du français) crée un prix destiné à récompenser l’auteur d’un ouvrage, d’une thèse ou d’une recherche, écrit ou traduit en français, sur une thématique juridique ou judiciaire, intéressant le fond du droit ou les missions, l’activité, la jurisprudence, l’histoire d’une ou de plusieurs hautes juridictions membres de l’AHJUCAF.

La jurisprudence des cours suprêmes

Juricaf

Partenaires

1 1 1
 

Les droits de l’enfant au Mali

 

M. Sambala Traore

Conseiller à la Cour suprême du Mali


Le droit des enfants


Maître G. DAUBLON, Vice–président du Conseil Supérieur français du notariat, citant Napoléon 1er, écrivait que « l’adoption constitue le plus grand acte que l’on puisse envisager et est une redoutable aventure ; Elle vise à atténuer, voir anéantir les liens de filiation par le sang, pour leur ajouter, voire leur substituer de nouveaux liens, par la seule volonté des hommes et dont les répercussions peuvent être considérables, heureuses ou malheureuses. » [1]

Depuis plusieurs décennies, l’adoption internationale constitue une préoccupation majeure de la communauté internationale et des pouvoirs publics nationaux à telle enseigne que l’adoption d’une Convention mieux adaptée à la situation des enfants concernées fut adoptée le 29 mai 1993 à La Haye. Cette convention est entrée en vigueur le 1er mai 1995. A ce jour ledit instrument international lie plus de 66 Etats parties dont le Mali. De plus en plus le nombre d’enfants étrangers adoptés à travers le monde augmente.

Toutefois, cette étude ne prétend pas présenter une analyse exhaustive de la situation de l’adoption internationale au Mali mais plutôt à monter la volonté politique du Mali de donner un effet à ses engagements internationaux en matière de protection des droits de l’enfant et de la coopération en matière d’adoption internationale. C’est ainsi que les développements
ultérieurs seront centrés sur la démonstration d’une possible conciliation entre la législation malienne sur l’adoption et les dispositions de la Convention de La Haye (Première partie) et l’existence de mesures politiques et institutionnelles inachevée en vue d’une adaptation de droit positif malien au droit international sur l’adoption (Deuxième partie).

CHAPITRE I : LA POSSIBLE CONCILIATION ENTRE LA LÉGISLATION MALIENNE ET LA CONVENTION DE LA HAYE SUR LA PROTECTION DES ENFANTS ET LA COOPÉRATION EN MATIÈRE D’ADOPTION INTERNATIONALE.

L’analyse d’une possible conciliation entre la législation malienne sur l’adoption et la Convention de La Haye implique d’abord de se pencher sur le rang qui revient à la norme internationale dans l’ordre juridique interne malien.

I. La détermination du rang de la Convention dans l’ordre juridique interne malien

Certes, l’introduction du droit international dans l’ordre juridique interne dépend essentiellement de l’option politique des Etats parties exprimée dans leurs Constitutions nationales respectives. Mais il est établi que la réception de la norme internationale dans le droit interne d’un Etat partie dépend également d’une condition dite objective liée à la précision ou non de ses dispositions. D’où l’importance en la matière
des théories constitutionnelles relatives au dualisme et au monisme.

Ainsi, l’efficacité de la mise en œuvre de la Convention dépendra donc du rang ou si l’on préfère de place faite à la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale. Il faut observer que la plupart des Etats modernes sont partagées le dualisme et le monisme même s’il existe une option dite intermédiaire.

- Selon l’école dualiste, l’ordre juridique interne et l’ordre international constituent un ensemble autonome et sans aucun lien possible. En effet, cette théorie soutient que l’ordre juridique international lie les Etats entre eux par des droits et par des obligations réciproques. Elle fait valoir que chaque Etat conserve son propre ordre juridique interne dont il conserve la maîtrise exclusive. Parmi les théoriciens de cette école, en particulier les allemands et les italiens connus à la
fin du XIXème siècle et au début du XXème siècle Triepel, Jellineck
et Anzilotti. Notons cependant le dualisme est fondé radicalement sur une conception quasi intégriste de la souveraineté étatique. Ainsi ses tenant font valoir que le droit international et le droit interne constituent deux ordres juridiques égaux, séparés et indépendants, que la norme internationale ne peut être incorporée dans l’ordre juridique interne qu’après une réception préalable.

Le traité devra donc impérativement être repris dans un acte de droit interne généralement une loi reprenant ses dispositions et prévoyant son application directe dans l’ordre juridique comme ayant la même valeur que la loi. -L’école moniste, en revanche supprime les frontières entre les deux ordres juridiques et se prononce en faveur de l’unité de l’ordre juridique international et de l’ordre interne. Parmi les représentants de la théorie moniste, certains noms méritent d’être cités notamment les Allemands Hans Kelsen et Paul Guggenheim et les Français Maurice Bourquin et Georges Scelle. Pour ces auteurs, la norme internationale et le droit interne sont deux ordres juridiques de même nature, constituant un seul et même ensemble. En conséquence pour les Etats qui sont d’obédience moniste le traité ou la convention va s’appliquer directement dans l’ordre juridique sans qu’il ne soit nécessaire de recourir à une procédure de transposition par opposition à la conception et à la pratique dualiste.

- Sur la problématique de l’applicabilité directe de la norme internationale dans le droit interne, nous pensons qu’il est utile d’observer que la position du Conseil d’Etat français et plus récemment celle de la Cour de Cassation française à partir de 2005 se prononcent pour l’applicabilité directe de la norme internationale en droit interne mais au cas par cas et selon que la disposition concernée est dite « claire » ou non.

- En droit positif malien, la Constitution malienne du 25 février 1992 de tendance moniste très fortement inspirée de la Constitution française 1958, stipule en son article 116 que « Les
traités ou accords internationaux ratifiés ou approuvés ont dès
leurs publications, une autorité supérieure à celle des lois sous
réserve toutefois de leur application par l’autre partie. »

Chaque Etat partie a l’obligation de procéder à l’adoption de mesures appropriées d’incorporation de la Convention dans son ordre juridique interne au moyen de lois de transposition. Le juge national malien chargé d’appliquer la loi nationale devra t- il se reconnaître compétent pour connaître les recours en justice fondés sur la Convention et présentés par l’enfant ou ses représentants légaux ? La doctrine dominante française admet que c’est l’option constitutionnelle de départ qui permettra avec plus ou moins de clarté de dire si le droit international est placé dans un rang supérieur par rapport au droit national. Il faut souligner que malgré le principe bien établi de la supériorité du droit international sur le droit interne l’immense majorité des Etats modernes confèrent à la norme à un rang supra- législatif mais infra- constitutionnel [2]

Conformément aux engagements qu’il a contracté en adhérant à la Convention de La Haye, le Mali, à l’instar des autres Etats parties a l’obligation de créer

- Ordonnance No 01 6 033 P- RM du 07 août 2001 portant adhésion du Mali à la Convention de la Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et sur la coopération en matière d’adoption internationale et le Décret No 01 – 391 du 06 septembre 2001 de publication de l’adhésion à la Convention des conditions objectives susceptibles de permettre à chaque enfant de pouvoir jouir pleinement des droits reconnus par la Convention de La Haye mais également par la Convention internationale du 20 novembre 1989 relative aux droits de l’enfant. Il s’agira notamment de créer les conditions objectives qui permettront à l’enfant notamment d’être protégé contre l’exploitation économique sous toutes ses formes [3].

II. L’émergence d’un nouveau droit sur l’adoption au plan international

La Conférence de La Haye de droit international privé s’est à plusieurs reprises intéressée à l’adoption. C’est dans ce cadre que fut adoptée la Convention du 15 novembre 1965 relative à la compétence des autorités, à la loi applicable et la reconnaissance des décisions redue en matière d’adoption. Cette Convention lie certains pays européen dont l’Autriche et la Suisse mais elle n’a pas été signée par la France. Toutefois, confrontée au changement de réalité sociale de l’adoption internationale et de son développement au plan universel, la Convention de 1965 s’est montrée insuffisante pour faire face à la dimension internationale de l’adoption.

C’est dans ce contexte que fut adoptée la Convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale. En effet, la Convention met l’accent sur la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant mais également sur l’importance de la coopération bilatérale ou multilatérale entre les autorités des Etats d’origine de l’enfant et ceux des Etats d’accueil de celui - ci. Elle constitue un instrument de coopération interétatique ayant pour but d’établir des règles communes relatives à la phase préalable d’adoption.

En vertu des dispositions de la Convention, les autorités de l’Etat d’accueil de l’enfant doivent constater que les requérants sont qualifiés et aptes à adopter. Quant aux autorités de l’Etat d’origine, elles, doivent vérifier que l’enfant est en état d’être adopté. Une fois ces conditions réunies, il incombe aux autorités des deux Etats d’assurer conjointement le placement de tout enfant identifié auprès des adoptants eux aussi déterminés. C’est ainsi que la convention détermine les conditions de fond et de forme du projet d’adoption qui fera ensuite l’objet d’une décision d’adoption.

Lorsque ces
conditions ont été scrupuleusement observées et appliquées, la convention confère à la décision une portée internationale par l’établissement des règles applicables à sa reconnaissance. Il apparaît important de mentionner qu’à la date du 1er janvier 2006 la Convention de La Haye était entrée en vigueur dans 66 Etats [4]. Le Mali non compris mais qui y avait cependant adhéré dès par une Ordonnance du 1er septembre 2001. Il conviendra donc de se pencher sur la reconnaissance et la protection du droit de l’enfant à être adopté (A) sur les réalités sociales et la pratique judiciaire limitée (B), le rôle de l’Autorité centrale et des organismes agréés (C) avant d’aborder l’examen de la reconnaissance de l’adoption internationale et de ses effets. (D)

A. La reconnaissance et la protection du droit de l’enfant à être adopté

Il conviendra de distinguer entre la reconnaissance et la protection du droit de l’enfant à l’adoption internationale selon la Convention de La Haye du 29 mai 1993 (1) et selon la législation malienne (2) avant d’aborder l’analyse des effets de l’adoption internationale. (3)
Dans son préambule, les Etats parties ont reconnu que pour l’épanouissement de la personnalité de l’enfant, celui - ci doit grandir dans un milieu familial, dans un climat de bonheur, d’amour et de compréhension. Les Etats se sont engagés à prendre par priorité toutes les mesures pour le maintien de l’enfant dans sa famille d’origine. Ils ont également reconnu que l’adoption est susceptible d’offrir une famille permanente à l’enfant pour lequel aucune famille appropriée n’a pu être trouvée dans son pays d’origine.

Par ailleurs, les Etats partie à la Convention ont souligné la nécessité de prévoir et de faire en sorte que les mesures relatives à l’adoption internationale soient prises dans l’intérêt supérieur de l’enfant et du respect de ses droits fondamentaux, en particulier sa protection contre l’exploitation économique de l’enfant sous toutes ses formes. Il faut en outre observer que la Convention est applicable seulement entre deux Etats partie. L’adoption est possible lorsque l’enfant est âgé de moins de huit ans ; l’adoption doit établir un lien de filiation ; peuvent être adoptant un couple, une personne seule mariée ou non. Sont cependant exclus de son champ d’application la Kafala du droit musulman, les demandeurs vivant en union libre, hétérosexuels ou homosexuels. Pour autant, il est important de distinguer entre les conditions de forme (a), de fond (b) et les rôle de l’Autorité centrale (c) et celui des organismes agréés (d) dans la mise en œuvre de la Convention.

1. Les conditions de forme

L’enfant concerné doit être âgé de moins de dix huit ans, qu’il soit résidant habituel dans l’un des Etats parties ou Etat d’origine. Il faut que le demandeur soit résidant habituel d’un Etat partie dit Etat d’accueil. Les Autorités centrales des deux Etats doivent donner leur accord et enfin que l’adoption projetée vise à établir un lien de filiation. Les demandes doivent être présentées par l’autorité compétente du futur pays d’accueil partie à la Convention.

2. Les conditions de fond

Aux termes des dispositions de la Convention, l’adoption internationale doit être essentiellement motivée par la défense de l’intérêt supérieur de l’enfant et dans le strict respect des droits fondamentaux de l’enfant. La mesure projetée doit en outre aux termes de dispositions de la Convention permettre d’instaurer une relation de coopération entre les Etats contractants afin de prévenir ou d’empêcher les enlèvements, la traite des enfants et toutes les autres formes d’exploitation économique des enfants.

Le consentement des personnes, des institutions et des autorités impliquées dans la procédure ait été obtenu et que qu’elles se soient faites entourées des conseils nécessaires et notamment des conséquences relatives au maintien ou à la rupture du lien entre l’enfant et sa famille d’origine. Les consentements requis doivent être donnés par écrit et sans aucune contre partie. En particulier, le consentement de l’enfant s’il est requis doit être donné par écrit ; ses souhaits et avis doivent également être pris en considération. Il faut par ailleurs noter au titre des conditions de fonds l’exigence liée au fait que les futurs parents adoptifs doivent être qualifiés et aptes à adopter un enfant. Les autorités compétentes de l’Etat d’accueil doivent en outre avoir constaté que l’enfant s’il est adopté sera autorisé à entrer puis à séjourner de manière permanente dans cet Etat.

B. Les réalités sociales sur l’adoption et une pratique judiciaire limitée

L’adoption en tant qu’institution constitue une réalité sociale malienne. Dans ce cadre le Centre National de Placement familial de Bamako, plus connu sous l’appellation de « Pouponnière » a été créé dès 1956. Initialement destiné à recueillir une trentaine d’enfants, elle accueille aujourd’hui plus d’une centaine. En 2004, le Centre a été rénové puis agrandi en vue de pouvoir améliorer les conditions sanitaires des enfants qui y sont accueillis. Il convient de préciser que ces travaux ont réalisés grâce au financement conjoint de l’Etat malien et des associations notamment l’Association dénommée Démisenya qui est une association de parents adoptifs du Mali).

A compter de 2004, l’institution du système du parrainage permet de payer les salaires des employés de la « Pouponnière de Bamako. En 2006 quelques enfants issus de la Pouponnière ont fait l’objet d’une adoption internationale. L’existence d’une Commission de l’adoption internationale mérite d’être notée mai fera l’objet des développements dans la deuxième partie de cette étude qui traitera des réformes politiques et institutionnelles adoptées par le Mali pour donner effet à a Convention de La Haye sur l’adoption internationale.

Il apparaît toutefois, important de noter qu’en 2009, la majorité des enfants adoptés en France provient de la Pouponnière de Bamako et des structures d’accueil privées comme l’Association pour la survie de la mère et Enfant (ASSUREME) et ASE- MALI. Ne faut-il pas admettre, compte de ces quelques éléments d’appréciation, que l’adoption simple de même l’adoption internationale constituent une réalité au Mali ?
Dans le cadre de la coopération l’Agence Française pour l’Adoption (AFA) collabore assez étroitement avec la Direction nationale de la Promotion de l’Enfant et de la Famille qui est l’Autorité Centrale au Mali conformément aux dispositions 12_ de la Convention. Pour les frais d’examen des demandes reçus, cette autorité a fixé • un montant forfaitaire de 115 euros pour la couverture des frais administratifs et ce à compter du 1er novembre 2008.

Devant les juridictions civiles maliennes compétentes en première instance, le nombre des procédures en adoption filiation est de plus en plus croissant. Ainsi, en fin décembre 2008, le nombre de dossiers d’adoption filiation en instance était estimé à 921. Sur ce chiffre 513 dossiers n’avaient pas fait l’objet d’apparentement. Il faut observer que d’une manière générale les requérants sont de nationalité étrangère en particulier française, belge, espagnole italienne ou allemande. Pour l’année 2008 le nombre d’adoption filiation prononcée par la justice malienne et assimilée à une adoption internationale au sens de la Convention de La Haye est chiffré à 72 enfants.

La pratique révèle que dans le District de Bamako, toutes les requêtes aux fins d’adoption protection ou d’adoption filiation sont portées devant le Président du tribunal de la Commune V du District de Bamako en raison peut être du fait que la Direction Nationale de la Protection de la promotion de l’enfant et de la Famille est située dans le ressort territorial de cette juridiction. Nous pensons que cette pratique n’est pas conforme aux dispositions du Code de procédure civile commerciale et sociale relative à la compétence territoriale et d’attribution des juridictions de l’ordre judiciaire au Mali.

S’agissant de l’appréciation de l’intérêt supérieur de l’enfant il n’est pas inutile d’observer que la décision finale revient au tribunal, le ministère public étant entendu au préalable en sa qualité de protecteur des droits des mineurs. Notons que le déroulement de toute la s’inspire assez bien des termes et de l’esprit de la Convention de La Haye et de l’Avant projet malien de Code des Personnes et de la Famille adopté par le gouvernement en 2002 pour donner effet audit instrument international. En guise d’illustration, dans les quatre cas d’espèce choisis, trois des requérants en adoption sont des couples de nationalité française, alors que la quatrième requête émane d’une femme seule aussi de nationalité française domiciliée à Paris tandis que les autres résident habituellement dans d’autres régions françaises dans le Nord-Pas de Calais et en Corrèze.

L’instruction se fait en chambre du conseil mais le jugement est prononcé publiquement par le tribunal de grande instance (France), le tribunal de première instance (Mali) siégeant bien sûr en matière civile. Si l’enfant a déjà un nom au jour du prononcé de la décision le changement intervient de plein droit au moyen d’une transcription en marge des registres de l’état civil. A titre comparatif, contrairement au droit positif malien, le juge français saisi d’une requête en adoption filiation a la faculté avec le consentement du demandeur et dans l’intérêt de l’enfant de prononcer une adoption simple. En effet, le Code de la parenté du Mali, dans sa section traitant des adoptions simples et filiation se contente de disposer en son article 70 que la filiation adoptive est irrévocable et ne précise nulle par la possibilité d’exercer les voies de recours ordinaires ou extraordinaires.

Toutes les décisions judiciaires rendues en premier ou en dernier ressort sont susceptibles au moins d’un recours devant la juridiction immédiatement supérieure pour le respect de la garantie d’un procès équitable. Le principe selon lequel ce qui n’est pas interdit par la loi est autorisé étant donné que nous sommes en matière civile où le raisonnement par analogie est permis. Dans le même ordre d’idées, à l’instar des dispositions du code de procédure civile français, s’agissant d’un jugement rendu par une juridiction de première instance en matière d’état des personnes, il est naturellement être susceptible d’appel.

Si en droit positif malien aucun délai de rigueur n’est imparti au juge pour clôturer son instruction, en droit français, la loi du 8 janvier 1993 fixe à six mois le délai maximum dans lequel le juge doit prendre sa décision en matière d’adoption plénière.

A titre d’exemples de jugements d’adoption filiation, nous avons relevé les décisions no 296 rendu le 22 mai ; 309 rendu le 29 mai ; 329 du 05 juin et 454 du 24 juillet 2006 par le tribunal de première instance de la Commune V du District de Bamako. S’agissant de jugements d’adoption plénière, ils ordonnent automatiquement la transcription du dispositif sur l’acte de naissance de l’enfant s’il y en a car l’adopté prend le nom patronymique ou nm de famille des adoptants, généralement le nom patronymique du mari au cas où l’enfant serait adopté par un couple marié. L’enfant peut cependant être adopté, soit par une femme seule soit par un homme seul ou célibataire.

Au titre de voies de recours, le pourvoi en cassation devra aussi être ouvert à toute personne justifiant d’un intérêt légitime et juridiquement protégé notamment les grands-parents de l’adopté qui auront reçu notification du jugement étant, entendu, qu’il s’agit d’une matière gracieuse. Ce droit d’appel est surtout reconnu au ministère public investi de la mission traditionnelle de protection des mineurs et de l’ordre public. Le dispositif du jugement prononçant l’adoption devra être transcrite à la requête du parquet sur les registres de l’état civil du lieu de naissance de l’adopté. En vertu des dispositions de l’article 68 du C. Parenté, l’œuvre ou la personne qui a recueilli l’enfant doit être entendue, il faut entendre l’organisme agréé par la DNPEF. La transcription du jugement à la requête du Ministère public tient lieu d’acte de naissance à l’adopté en remplacement de tout autre acte de naissance existant.


C. Le rôle de l’Autorité centrale et des organismes agréés

Nous proposons d’aborder l’intervention de l’Autorité centrale ensuite celle des organismes agréés dans la mise en œuvre de l’adoption internationale.

1. Le rôle de l’autorité centrale dans la mise en œuvre de la
Convention

Aux termes des dispositions de la Convention de La Haye déjà évoquée [5]. Chaque Etat contractant, pour donner effet à ses engagements internationaux désigne une autorité centrale chargée de satisfaire aux obligations qui lui sont imposées par la Convention. Ainsi que les autorités centrales doivent coopérer entre elles et promouvoir une collaboration entre les autorités compétentes de leurs Etats en vue d’assurer la protection des enfants et d’atteindre les objectifs de la Convention. Pour la mise en œuvre de la Convention les Etats contractants sont en outre invités à prendre directement toutes les mesures appropriées, en fournissant des informations relatives à la législation nationale applicable en matière d’adoption ou des statistiques et des formules types. Dans le même ordre d’idées, les Etats contractants doivent s’informer sur l’application de la Convention dans la mesure du possible ainsi que sur les difficultés de sa mise en œuvre et éventuellement sur les stratégies de lever de ces obstacles [6].

Par ailleurs, les autorités centrales doivent aussi prendre soit directement soit avec le concours des autorités publiques pour veiller à une exacte application des termes de la Convention en particulier pour prévenir et empêcher les gains matériels indus à l’occasion de l’adoption contraires aux objectifs de l’instrument international dont il s’agit. Dans le même ordre d’idées, les autorités centrales peuvent adopter directement des mesures appropriées qui permettent d’échanger entre Etats contractants des rapports généraux d’évaluation sur les expériences dans le domaine de l’adoption internationale. Dans le cadre des échanges d’informations, les autorités centrales doivent prendre également des mesures qui leur permettent de répondre à toutes demandes motivées de renseignements sur une demande particulière émanant d’autres autorités centrales ou des autorités publiques d’Etats contractants [7].

- Au Mali, l’Autorité centrale habilitée est la Direction nationale de la Promotion et de la Protection de l’enfant et de la famille. D’où la nécessité d’évoquer son rôle et son implication dans la mise en œuvre de l’adoption internationale entre le Mali et tout autre Etat contractant à la Convention de La Haye. La Direction nationale de la promotion et de la protection de l’enfant est chargée de la promotion de l’Enfance assure la collecte et la lise à disposition des informations sur la législation en matière d’adoption et prend toutes les mesures appropriées pour la bonne exécution des dispositions légales prescrites sur l’adoption. Ce service devra en outre veiller au respect des conventions internationales et œuvre e à la levée de tous les obstacles à leur exécution. Pour la réussite de l’adoption, l’Autorité centrale en matière d’adoption internationale, en l’espèce la Direction Nationale de la Promotion de l’enfant directement ou avec le concours des autorités publiques et organismes dûment agréées, devra prendre toutes les mesures qui s’imposent, notamment en rassemblant, en conservant et en échangeant des informations relatives à la situation de l’enfant, de ses parents adoptifs pour la réalisation de la mesure d’adoption projetée.

Conformément aux dispositions de l’Avant projet de 2002 déjà évoqué les personnes demanderesses, étrangères ou de nationalité malienne résidentes à l’étranger désirant adopter un enfant malien devront procéder conformément aux prescriptions de la loi nationale applicable. Les demandes d’adoption doivent entre adressées aux autorités centrales du Mali pour une adoption visant un enfant malien résident dans un autre Etat. Dans la mesure où des accords bilatéraux ou multilatéraux existent entre ce pays et le Mali et si des conventions spécifiques sur l’adoption les y autorisent [8].

Dans le domaine de la coopération entre autorités centrales et en guise d’exemple il n’est pas inintéressant de noter qu’entre la France et le Mali, les demandes en adoption internationales sont transmises par l’Agence Française de l’Adoption (AFA) à la Direction Nationale de l’Enfant et de la Famille (DNEF).

Dans le cas où l’Autorité centrale malienne considère que l’enfant peut être adopté, elle établit un rapport contenant tous les renseignements sur l’identité de l’enfant son aptitude à la mesure sollicitée, sur son milieu social, sur son évolution familiale et personnelle ainsi que sur ses besoins particuliers en tenant compte des conditions d’éducation et de l’origine ethnique religieuse et culturelle. La DNEF s’assure une fois de plus que les consentements requis aient été donnés conformément à la loi. Il est important de souligner que l’adoption envisagée doit être motivée par l’intérêt de l’enfant. L’autorité centrale de l’Etat d’accueil doit avoir donné son accord et les autorités des deux Etats concernés doivent avoir en outre consenti à la poursuite de la procédure d’adoption en précisant que les futurs parents adoptifs seront autorisés à entrer et à séjourner dans le pays d’accueil de façon permanente. L’autorité centrale devra faciliter l’obtention de l’autorisation de sortie de l’Etat d’origine en prenant à cet effet toutes les mesures adéquates.

Lorsque la mesure d’adoption concerne un enfant un enfant déjà déplacé dans l’Etat d’accueil et celui-ci considère que le maintien de l’enfant dans la famille d’accueil ne répond plus à son intérêt supérieur l’autorité prendra toutes les mesures en vue de retirer l’enfant et d’en prendre soin provisoirement et ce en consultation avec l’autorité centrale malienne en vue d’assurer dans les meilleurs délais une nouvelle adoption dans la mesure du possible et dans le cas contraire il conviendra d’envisager une prise en charge alternative durable. Le retour de l’enfant sera en tout état de cause autorisé si son l’intérêt supérieur le commande. Il convient de d’observer que l’âge et le degré de discernement de l’enfant seront pris en considération avant de demander son consentement avant toutes mesures le concernant.
La Direction nationale de la promotion de l’enfance veille au suivi des enfants ayant fait l’objet d’une mesure d’adoption. Elle établit annuellement un rapport sur les conditions de déroulement des adoptions. Il faut cependant souligner que c’est dans le cadre des accords bilatéraux et multilatéraux qu’ont lieu le suivi et l’évaluation des adoptions internationales intervenues. S’il n’existe pas d’accords bilatéraux ou multilatéraux, le suivi et l’évaluation sont assurés par les représentations Consulaires ou Diplomatiques maliennes conformément aux dispositions de la Convention et du Projet de loi portant code des personnes et de la Famille.

2. L’intervention des organismes agréés ou personnalisés

Conformément aux dispositions de la Convention, les organismes qui justifient leur aptitude à remplir correctement les missions qui pourraient leur être confiées dans le cadre d’une adoption internationale sont les seuls à pouvoir bénéficier de l’agrément et à la conserver. Il faut toutefois mettre en exergue que pour être agréé, l’organisme doit poursuivre des buts non lucratifs et ceux dans les conditions et les limites déterminées par les autorités compétentes de l’Etat d’agrément. L’organisme agréé doit être dirigé par des personnes reconnues pour leur intégrité morale, ayant une formation ou une expérience dans le domaine de l’adoption internationale. L’organisme agréé doit être soumis à un contrôle des autorités nationales compétentes pour sa composition, son fonctionnement et sa gestion financière. L’organisme agréé est doté d’une compétence territoriale nationale sauf autorisation expresse des deux Etats contractants.
Il apparaît utile de souligner que la Convention fait obligation à chaque Etat contractant de communiquer au Bureau de la Conférence de La Haye de droit international privé les documents relatifs à la désignation des Autorités centrales, l’étendue de leurs fonctions ainsi que les nom et adresse des organismes agréés [9].

D. Selon la législation malienne

Par un
e Ordonnance du 1er septembre 2001, le Mali ayant adhéré à la Convention de La Haye, il conviendra maintenant le point sur les mesures législatives en vigueur jusqu’en 2001 (a) et sur celles adoptées postérieurement à 2001 dans le domaine de la reconnaissance et de la protection de l’adoption filiation (b).

a. Le point sur les dispositions législatives en vigueur jusqu’en 2001

L’essentiel de la législation malienne sur le droit de la famille résulte du Code de la Parenté et du Code du mariage et de la tutelle (CMT) Toutefois les dispositions qui reconnaissent et protègent le droit de l’enfant à être adopté doivent être recherchées dans une loi de 1973 portant Code de la Parenté et notamment en ses articles 59 et suivants. Le Code de la parenté organise l’adoption protection et l’adoption filiation. Toutefois, seule l’adoption filiation paraît être la seule forme susceptible d’intéresser cette étude. A la différence de l’adoption protection l’adoption filiation exige que l’adopté soit un enfant âgé de moins de cinq ans. Les demandeurs à la procédure d’adoption filiation, doivent être âgés au moins 30 ans. Cependant s’agit d’un couple l’un au moins des époux devra être âgés de 30 ans. La demande pourra être présentée également par un homme seul ou une femme seule. Les dispositions légales applicables sont les articles 66-70 du même Code de la Parenté.

Par la ratification de la Convention de La Haye, chaque Etat contractant dont le Mali s’est engagé vis à vis des autres Etats à favoriser l’accès de tout enfant vivant sous sa juridiction et dans l’intérêt supérieur de celui - ci mais également dans le respect de ses droits fondamentaux reconnus par le droit international. Les Etats se sont en outre engagés aux termes de la Convention à instaurer un système de coopération entre eux. (Etats contractants) [10].

b. Le point sur les mesures législatives adoptées postérieurement à 2001

Une Ordonnance du 6 juin 2002 portant Code de Protection de l’Enfant mérite également d’être mentionnée. Dans le même mordre d’idées, l’existence du Projet de loi de 2002 portant Code des Personnes et de la Famille ne doit pas être perdu de vue. En effet, ce projet de loi adopté par le gouvernement en 2002 a fait l’objet d’une relecture en 2005 par la Commission créée à cet effet par le Premier Ministre. En octobre 2007, ledit projet a été déposé sur le Bureau de l’Assemblée nationale mais paraît pas toujours avoir été adopté en dépit de l’annonce faite par le président de la République dons son discours à la nation le 22 septembre 2007. Les raisons non avouées du retard constaté dans son adoption par le parlement seraient d’ordre culturel ou religieux.

Les dispositions de l’article 19 du Code de protection de l’Enfant adopté
le 6 juin 2002 reconnaissent le droit de l’enfant temporairement ou définitivement privé de famille d’être adopté (128).

Il est primordial que les requérants de savoir qu’ils ne doivent avoir ni enfant ni descendant légitime à la différence de la législation française qui admet que le ou les demandeurs aient des descendants lesquels dans le cadre de l’instruction devront être entendus par le juge français. Selon le Code civil français, l’enfant âgé de plus de 13 ans peut s’opposer au consentement de ses père et mère, autrement dit si le consentement des père et mère est nécessaire pas il n’est pas suffisant en droit français.

Les préoccupations de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et sur la coopération en matière d’adoption internationale sont prises en charge par l’Avant-projet de loi de 2002 portant Code des personnes et de la famille déjà évoqué. En effet, aux termes des dispositions dudit l’Avant –projet, toute adoption d’un enfant malien par un étranger ou par un malien ne peut avoir lieu que si certaines conditions sont réunies. (Avant projet de code des personnes et de la famille déjà abondamment évoqué en son article 419- 423).

Les autorités compétentes du Mali doivent avoir établi que l’enfant est apte à être adopté. Il doit s’agir d’un enfant temporairement ou définitivement privé de son milieu familial ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu. Ainsi cet enfant a droit à une protection ou aide spéciale de l’Etat. Selon ledit Projet de loi l’adoption doit répondre à l’intérêt supérieur de l’enfant qui doit avoir été constaté parles autorités chargées de l’instruction du dossier de la procédure. Le consentement des autorités compétentes et des institutions requises en la matière devra être donné librement dans les formes de la loi et par écrit. Le consentement de la mère de l’enfant s’il est requis ne peut être donné qu’après la naissance de l’enfant. Toutefois, l’Avant projet prescrit qu’avant de donner leur consentement les autorités compétentes maliennes devront prendre toutes les mesures nécessaires en tenant compte de l’âge et de la maturité de l’enfant. Les souhaits et avis de l’enfant doivent avoir été pris en considération. Son consentement dans les cas où il est demandé doit avoir été donné librement dans les forme et délai de la loi et par écrit. L’enfant devra avoir donné son consentement sans qu’il n’ait été subordonné au paiement d’une contre partie quelconque.

L’adoption internationale ne pourra être autorisée qu’à la condition que les futurs adoptants aient été entourés des conseils nécessaires. Il est outre important de mentionner que le succès de la mesure sollicitée est subordonné à la certitude constatée que l’enfant sera autorisé à entrer et à séjourner de façon permanente dans son pays d’accueil. Le demandeur à l’adoption fournira à la demande du service national chargé de la promotion de l’enfance, l’autorité compétente du pays de résidence du requérant un rapport. Ce rapport devra contenir tous les renseignements sur l’identité de l’adoptant notamment sa capacité légale, ses aptitudes à adopter, sa situation personnelle familiale médicale son milieu social et les motifs de la demande.

- La Direction nationale de la promotion et de la protection de l’enfant est chargée de la promotion de l’Enfance assure la collecte et la lise à disposition des informations sur la législation en matière d’adoption et prend toutes les mesures appropriées pour la bonne exécution des dispositions légales prescrites sur l’adoption. Ce service devra en outre veiller au respect des conventions internationales et œuvre e à la levée de tous les obstacles à leur exécution. Pour la réussite de l’adoption, l’autorité centrale en matière d’adoption internationale, en l’espèce, la Direction Nationale de la Promotion de l’enfant directement ou avec le concours des autorités publiques et organismes dûment agréées, devra prendre toutes les mesures qui s’imposent, notamment en rassemblant, en conservant et en échangeant des informations relatives à la situation de l’enfant, de ses parents adoptifs pour la réalisation de la mesure d’adoption projetée.

La même autorité doit faciliter, suivre et activer la procédure en vue de l’accélération de la procédure de l’adoption en cours. Elle doit promouvoir le développement des services de conseils en vue de l’adoption et pour son suivi. La même autorité centrale doit veiller à l’échange des rapports généraux d’évaluation sur les expériences en matière d’adoption internationale et répondre dans les limites autorisées à toutes les demandes d’informations présentées par d’autres autorités centrales ou publiques.

Ainsi, selon les dispositions de l’Avant projet de 2002 déjà évoqué les personnes demanderesses, étrangères ou de nationalité malienne résident à l’étranger désirant adopter un enfant malien devront procéder conformément aux prescriptions de la loi portant code des personnes et de la famille. Les demandes d’adoption doivent entre adressées aux autorités centrales du Mali pour une adoption visant un enfant malien résident dans un autre Etat.

Lorsque l’Autorité centrale malienne considère que l’enfant peut être adopté, elle établit un rapport contenant tous les renseignements sur l’identité de l’enfant son aptitude à la mesure sollicitée, sur son milieu social, sur son évolution familiale et personnelle ainsi que sur ses besoins particuliers en tenant compte des conditions d’éducation et de l’origine ethnique religieuse et culturelle. Cette autorité centrale du Mali qui n’est autre que la Direction Nationale de la protection de l’Enfant et de la Famille, s’assure une fois de plus que les consentements requis aient été donnés conformément à la loi. L’adoption envisagée est justifiée par l’intérêt de l’enfant. L’autorité centrale de l’Etat d’accueil doit avoir donné son accord et les autorités des deux Etats concernés doivent avoir en outre consenti à la poursuite de la procédure d’adoption en précisant que les futurs parents adoptifs seront autorisés à entrer et à séjourner dans le pays d’accueil de façon permanente. L’autorité centrale devra faciliter l’obtention de l’autorisation de sortie de l’Etat d’origine en prenant à cet effet toutes les mesures adéquates.
Lorsque la mesure d’adoption concerne un enfant un enfant déjà déplacé dans l’Etat d’accueil et celui-ci considère que le maintien de l’enfant dans la famille d’accueil ne répond plus à son intérêt supérieur l’autorité prendra toutes les mesures en vue de retirer l’enfant et d’en prendre soin provisoirement et ce en consultation avec l’autorité centrale malienne en vue d’assurer dans les meilleurs délais une nouvelle adoption dans la mesure du possible et dans le cas contraire il conviendra d’envisager une prise en charge alternative durable. Le retour de l’enfant sera en tout état de cause autorisé si son l’intérêt supérieur le commande. Il convient de d’observer que l’âge et le degré de discernement de l’enfant seront pris en considération avant de demander son consentement avant toutes mesures le concernant.
En la matière il apparaît aussi intéressant de mentionner l’existence de quelques décisions judiciaires qui illustrent l’incorporation dans le droit positif malien des dispositions protectrices de la Convention de New York sur les droits de l’enfant et de celle de La Haye du 29 mai 1993 ratifiée le 7 août 2001 par le Mali [11].

Dans ces quatre cas d’espèce, trois des requérants sont des couples mariés tandis que la quatrième requête a été présentée par une femme seule de nationalité malienne. Il faut également remarquer que sur les trois couples demandeurs, deux sont de nationalité malienne et résident au Mali ; le troisième couple est de nationalité française et réside à Rennes.

Conformément à l’esprit de la Convention de La Haye, la Direction nationale de la promotion de l’enfance assure le suivi des enfants ayant fait l’objet d’une mesure d’adoption. Il établit annuellement un rapport sur les conditions de déroulement des adoptions étant entendu que c’est dans le cadre des accords bilatéraux et multilatéraux qu’ont lieu le suivi des adoptions internationales. S’il n’existe pas d’accords bilatéraux ou multilatéraux, le suivi est assuré par les représentations Consulaires ou Diplomatiques maliennes.

L’adoption filiation (adoption plénière en droit français) et de l’adoption protection (ou adoption simple en droit français) est reconnue et réglementée par le droit positif du Mali, et l’avant-projet de loi de 2002 portant Code des personnes et de la famille revue en 2005 par une Commission créée par la Primature a finalisé ses travaux courant août 2005. Il prend en compte, d’une très détaillée l’adoption internationale. Il prévoit même une procédure de suivi en la matière.

E. La reconnaissance de l’adoption internationale et ses effets

A l’instar de toute décision ou acte judiciaire l’adoption internationale a pour vocation de produire des effets à l’égard à la fois de l’adoptant, de l’adopté des tiers mais spécifiquement à l’égard des Etats parties ou contractants. En effet, selon les dispositions de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en la matière, l’adoption est reconnue valable de plein droit dans les Etats contractants, lorsqu’elle est certifiée conforme à la Convention par l’autorité compétente (au Mali c’est la DNPEF) de l’Etat contractant où elle a eu. La Convention stipule que la reconnaissance d’une adoption peut être refusée par un Etat partie si elle est manifestement contraire à l’ordre public eu égard à l’intérêt de l’enfant [12].

- Article 169 du Code de la parenté du Mali.

A l’instar de la législation française, en droit positif malien l’adoption filiation possède des effets juridiques vigoureux conférant à l’adopté le bénéfice des droits successoraux non seulement à l’égard de l’adoptant mais aussi vis à vis des membres de la famille de ce dernier. L’adopté acquiert en même temps la qualité d’héritier réservataire de l’adoptant et de ses ascendants et réciproquement si l’adopté pré décédait ne laissant aucun enfant pour recueillir sa succession celle-ci sera partagée comme dans le cas d’un enfant par le sang tant en droit positif français qu’en droit positif malien. (18)

L’adopté acquiert par ailleurs la nationalité de l’adoptant dans les conditions que l’enfant légitime ou tout autre enfant. C’est la consécration de la rupture des liens biologiques avec sa famille d’origine. Une fois établie la filiation adoptive est en principe irrévocable sauf pour des motifs graves comme les actes d’indignité ou d’ingratitudes caractérisées, notamment la tentative d’assassinat ou autre attentat à la vie de l’adoptant ou de l’adopté et réciproquement. L’adoption filiation crée également des droits et des obligations entre l’adoptant et l’adopté comme entre parents et enfants biologiques. Elle fait également naître une obligation alimentaire à la charge des père et mère envers leur enfant.

CHAPITRE II : UNE ADAPTATION INACHEVÉE DU DROIT POSITIF MALIEN SUR L’ADOPTION INTERNATIONALE

Pour la mise en œuvre des dispositions de la Convention, les Etats parties se sont engagés, chacun en se qui le concerne à prendre toutes les mesures appropriées mais également à établir des relations dans le cadre de la coopération bilatérale ou multilatérale. Il conviendra donc d’évoquer les mesures institutionnelles et politiques adoptées par le Mali (I), les activités de contrôle externe prévue par la Convention (II) et le mécanisme interne ou national de contrôle de l’application des mesures adoptées (III).

I. Les réformes institutionnelles et politiques existantes ou adoptées par le Mali

Nous traiterons d’abord la dimension institutionnelle des réformes (A) avant d’aborder la dimension politique (B).

A. La dimension institutionnelle des réformes

Pour donner effet à la Convention, le Mali dispose au plan institutionnel en particulier d’un Ministère de la Promotion de Femme de l’Enfant et de la Famille. La protection et la promotion de l’adoption internationale est assurée par la Direction nationale pour la Promotion de l’Enfant et de la Famille (DNPEF) prise en sa qualité d’Autorité centrale. Il existe également une série d’institutions publiques et privées d’accueil et de placement des enfants qui peuvent faire l’objet d’une adoption filiation. Parmi ces institutions, peuvent être citées entre autres le Centre d’Accueil et de Placement Familial de Bamako (institution publique) et l’Association pour la Survie de la Mère et de l’Enfant (ASSUREME) et l’ASE - Mali sise à Bamako et qui constituent des institutions privées assez récentes d’accueil et de placement d’enfants.

A cette énumération non limitative, il apparaît utile de mentionner l’existence du Deuxième orphelinat de Bamako doté d’une capacité d’accueil d’une centaine d’enfants, situé dans la Cité UNICEF au quartier de Niamakoro et qui a été inauguré seulement le 11 mars 2009. Il s’agit d’un centre moderne doté d’une salle de couture, de rééducation,
d’une infirmerie d’une cuisine et d’une dizaine de dortoirs. Ce nouveau centre est le fruit de la coopération entre la Fondation pour l’Enfance et l’ordre œcuménique de Malte. La marraine de ce nouveau centre est la Première Damme du Mali.

Au nombre des structures institutionnelles de protection des droits de l’enfant, la Commission nationale de l’adoption internationale, la Commission nationale chargée de la protection des enfants réfugiés et la Commission nationale de lutte contre la drogue méritent aussi d’être notées. En effet, la création de chacune de ces commissions s’inscrit dans le cadre des mesures d’application de la Convention de New York relative aux droits de l’enfant, laquelle possède des convergences de vue avec la Convention de La Haye en matière de protection de l’enfant. Chacune de ces commissions assiste le gouvernement du mali dans l’élaboration et la mise en œuvre de sa politique, notamment de gestion des questions liées à l’application de la Convention de La Haye du 29 mai 1993 relative à la protection des enfants et à la coopération en la matière. C’est dans cette optique que la Commission chargée des réfugiés qui dispose de deux centres de transit et d’hébergement dont l’un situé à Faragouaran (Préfecture de Yanfolila). Elle prépare les dossiers de demandes de reconnaissance du statut de réfugiés des enfants seuls ou accompagnés de leurs parents.

Créée par un décret du président de la République daté du 6 septembre 2001, la Commission nationale chargée de l’adoption internationale, coordonne et assure le suivi des activités de gestion des demandeurs en adoption internationale, prépare les dossiers et veille à la protection des enfants adoptés. Elle est rattachée à la DNEF. En guise d’illustration, il faut noter que sélectionnés trois dossiers le 3 octobre 2008. (19) Il faut cependant observer que selon les mêmes sources, un nombre considérable de dossiers sont en instance.

L’ASSUREME et l’ASE - Mali qui recueil les enfants destinés à l’adoption
filiation ou à être placés dans des familles d’accueil exercent leurs activités en vertu dotés d’un agrément de la DNPEF et sous son contrôle. Au titre des nouvelles institutions il apparaît utile de mentionner l’existence du Centre de Recherche, d’Etudes et de Documentation pour la Survie de l’enfant (CREDOS). Il faut espérer que le CREDOS permettra de supplier au vide créé par l’inexistence de données statistiques fiables et spécifiques sur la situation des enfants vivant dans des situations particulièrement difficiles. Notons que le C.R.E.D.O.S est un établissement public à caractère scientifique rattaché au Ministère de la Santé.

Dans le domaine de la protection de l’enfant, la mise en place ou la réhabilitation d’organisations non gouvernementales ou d’association de la société civile ne doit pas en outre être perdu de vue. Il s’agit entre autre de trois fondations / la Fondation pour l’Enfance, la Fondation Mali Solidarité et la Fondation Partage. Il existe également des structures de coordination des associations et des Organisations non gouvernementales (ONG) de protection des droits de l’enfant. Parmi elles nous pouvons retenir la Coalition Malienne de Défense des droits de l’Enfant (COMADE), le Comité de Coordination des Associations et des ONG (CCA-ONG) le Réseau Malien pour la Sauvegarde de l’Enfance en Difficulté (ODEF).

B. La dimension politique des réformes

Pour donner effet aux recommandations pertinentes du Sommet mondial tenu à New York en septembre 1990 sur les enfants un nombre restreint de pays ont procédé à une augmentation des dépenses consacrées aux services sociaux de base en faisant notamment appel à l’aide dans le cadre du financement international. C’est dans ce cadre que des rubriques budgétaires spéciales pour les enfants furent élaborées et mises en œuvre à partir de 1998 par le gouvernement du Mali. Ainsi au titre de ces programmes politiques, le Programme de Développement Décennal de l’Education (PRODEC), le Programme de Développement Décennal Social et Sanitaire (PRODESS), le Programme de Développement Décennal de la Justice (PRODEJ) et le Plan d’Action pour la Promotion de la Femme et de l’Enfant (2000-2006).

II. Les mécanismes de contrôle de l’application de la Convention

A. Le contrôle exercé par le Secrétaire général de la Conférence de La Haye de droit international privé

Aux termes des dispositions de la Convention de La Haye du 29 mai 1993, le Secrétaire général de la Conférence de La Haye de droit international privé est habilité à convoquer périodiquement une Commission spéciale pour l’examen de la mise en œuvre de la Convention par les Etats parties (28).

B. Le contrôle exercé par l’autorité centrale nationale

Aux termes des dispositions de l’article 33 de la Convention, toute autorité compétente qui constate qu’une disposition de la Convention a été méconnue ou risque manifestement de l’être est invitée à informer immédiatement l’Autorité centrale de l’Etat partie dont elle relève. Cette autorité doit veiller en conséquence à faire prendre toutes les mesures utiles qui permettent d’empêcher ou de prévenir la violation des dispositions de la Convention.
Au Mali, l’Autorité Centrale compétente pour exercer le contrôle de l’application et du respect des dispositions de la Convention de La Haye sur la protection des enfants en matière d’adoption internationale est la DNPEF. En conséquence elle contrôle les activités des institutions publiques et privées d’accueil et de placement déjà évoquées dans les précédents développements. La DNPEF exerce également son contrôle en examinant les dossiers de d’adoption filiation qui lui sont transmis par les autorités centrales françaises, belges ou espagnoles en particulier.

Conclusions et propositions

Conclusions

La Convention de La Haye est entrée en vigueur le 1er octobre 1998 au plan international. Par une Ordonnance du 7 août 2001 du Président de la République, le Mali y a adhéré. Etant observé qu’aux termes des dispositions de l’article 46 de la Convention, elle entre en vigueur le premier jour du troisième suivant le dépôt des instruments de ratification, d’approbation ou d’adhésion, il faut admettre que l’entrée en vigueur au Mali dudit instrument international correspond au — novembre 2001.

(28) Article 42 de la Convention de la Convention de La Haye op. cit.
Quelles sont les mesures ou es réformes adoptées par le Mali pour donner à ses engagements internationaux vis à vis de la Convention, pour son introduction dans le droit positif ?

A la date de l’adhésion du Mali à la Convention, le droit positif malien disposait déjà d’un Code de la Parenté (C. Parenté), d’un Code de Protection de l’Enfant (C.P.E). Il faut mentionner également l’existence d’un Avant projet de Code des personnes et de la famille. Ces composantes du droit positif malien sur le droit de la famille traitent chacune de la protection de l’enfant dans le domaine de l’adoption. Le Code de la Parenté dans ses articles 59 et suivants règle l’adoption protection et l’adoption filiation. Cette dernière catégorie (l’adoption filiation) en raison notamment de sa portée au plan international paraît conforme à l’esprit et à la lettre de la Convention de La Haye du 23 mai 1993 (21 Le C.P.E reconnaît le droit de tout enfant âgé de moins de cinq ans à l’adoption filiation. Quant au projet de Code des Personnes et de la Famille, il a été adopté par le Gouvernement depuis 2000 mais attend encore d’être adopté par le parlement nonobstant cette annonce faite par le Président de la République dans son message à la Nation à l’occasion de la fête d’indépendance du 22 septembre 2007. En effet ledit projet traite expressément de l’adoption internationale et se trouve assez fortement inspiré par les dispositions de la Convention de La Haye. Dans la pratique les tribunaux prononcent plusieurs 141
jugements d’adoption filiation en application du C. de la Parenté ayant une portée internationale ainsi que l’atteste le tableau illustratif évoqué dans les précédents développements à la page 21.

Dans le même ordre d’idées, la création d’une Commission nationale chargée de l’adoption internationale et son rattachement à l’autorité Centrale (la DNEF), l’existence d’une Commission nationale chargée de la protection des réfugiés y compris les enfants, l’existence d’une relation de coopération entre la DNEF et l’AFA constituent l’expression d’une volonté politique du Mali d’adaptation de sa législation et de ses institutions au droit international sur l’adoption.

Propositions

Malgré les efforts accomplis par le Mali en matière de protection et de la reconnaissance de l’adoption internationale, nous pensons qu’il conviendrait, en vue de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), il apparaît nécessaire :
- d’accélérer et poursuivre les mesures en cours pour le vote par l’Assemblée Nationale du Projet de loi relatif au Code des Per
sonnes et de la Famille afin de rendre la législation nationale plus
conforme au droit international sur l’adoption, -de redynamiser la Commission nationale de réflexion sur l’adoption internationale, d’envisager de la rendre plus autonome ou au
besoin de la rattacher au Ministère des Affaires Etrangères afin de
renforcer sa coopération avec les structures des autres Etats parties à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale,
- de permettre aux autres juridictions de première instance de Bamako d’exercer leur compétence d’attribution et territoriale pour connaître les procédures judiciaires en matière d’adoption, étant entendu que le fait de ne saisir que le seul tribunal de la Commune V du District de Bamako et d’exclure les autres juridictions du même ordre n’a
aucune justification dans le Code de procédure civile commerciale et sociale et peut justifier en partie une certaine lenteur évoquée par
les demandeurs au niveau de l’examen et du jugement des affaires d’adoption internationale.

[1R. CRONE, M. REVILLARD et B. GELOT, op. cit. dans sa Préface.
ensuite s’intéresser à montrer l’émergence d’un nouveau droit sur l’adoption international motivée par le seul intérêt supérieur de l’enfant

[2Pour tous ces points, J- C. ZARKA, « Droit international public, inclus les textes de la Charte des Nations Unies et de la Convention de Vienne sur le droit des traités, Collection Mise au Point », 2006, Ed. Ellipses, pp. 19 et 20 ; DE BRICHAMBAUT M -P, J-F. DOBELLE et M-R. D’HAUSSY, « Leçons de Droit International Public, Collection amphi »,
2002, Ed. aide. Presses de sciences PO et DALLOZ, p. 40.
- P -DUPUY, « Doit international public, 7ème édition, Collection Droit public, Science politique », 2004, Ed. PRECIS
DALLOZ, pp. 403 – 408.

[3Cf. Pour tous ces points, J- C. ZARKA, « Droit international public, inclus les textes de la Charte des Nations Unies et
de la Convention de Vienne sur le droit des traités, Collection Mise au Point », 2006, Ed. Ellipses, pp. 19 et 20 ; DE BRICHAMBAUT M -P, J-F. DOBELLE et M-R. D’HAUSSY, « Leçons de Droit International Public, Collection am-phi », 2002, Ed. aide. Presses de sciences PO et DALLOZ, p. 40.
- P -DUPUY, « Doit international public, 7ème édition, Collection Droit public, Science politique », 2004, Ed. PRECIS
DALLOZ, pp. 403 – 408.
- R. CRONE, MREVILLARD, B. GELOT, “ L’adoption - Aspects internes et internationaux”, op. cit. p. 242.

[4R. CRONE, M. REVILLARD et B. GELOT, « L’adoption -Aspects internes et internationaux », 2006, Ed. DEFRENOIS – GUALINO – JOLY LGDJ -MONCHRESTIEN, pp. 144 et 145

[5Article 6 de la Convention de La Haye du 29 mai 1993 relative à la protection des enfants et à la coopération en
matière d’adoption internationale.

[6Article 6 de la Convention de La Haye du 29 mai 1993 relative à la protection des enfants et à la coopération en
matière d’adoption internationale.

[7C. Richard, M. REVILLARD, B. GELOT, « L’adoption Aspects internes et internationaux, Ed. DUFRENOIS, 2006,

[8Pour tous ces points, il conviendra de se reporter aux articles 419-423 424 et 425 de l’Avant Projet portant Code des personnes et de la famille du Mali.

[9Articles 1 -13 de la Convention in op. cit ; 245

[10Article 1er de la Convention de La Haye, in C. Richard, M. REVILLARD, B. GELOT, p. 242.

[11Pour ces points il conviendra de mentionner que nous avons pu sélectionner au hasard quatre jugements d’adoption protection ou d’adoption simple no 420 du 10 juillet, 434 du 17 juillet, 646 du 16 octobre et 745 du 4 décembre tous rendus en 2006 par le tribunal civil de la Commune V du District de Bamako.

[12Articles 23 – 26 de la Convention de La Haye du 29 mai 1993

 
  • Facebook
  • RSS Feed