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Président de la chambre civile de la Cour suprême de la République tchèque
La Convention relative aux droits de l’enfant, publiée sous le no 104/1991 Sb., fait partie, en tant que telle et dans son intégrité, de l’ordre juridique de la République tchèque. En effet, aux termes de l’article 10 de la Constitution de la République tchèque, les « traités internationaux sur les droits de l’homme et les libertés fondamentales à la ratification desquels le Parlement a donné son consentement et par lesquels la République tchèque est engagée sont directement applicables ; en cas de divergence entre le traité international et la loi, le traité international s’applique ».
Les droits de l’enfant consacrés par différents articles de la Convention se répercutent sur l’ensemble de l’ordre juridique de la République tchèque et apparaissent dans de nombreuses lois en vigueur où ils étaient présents même avant la ratification de la Convention, telles que la loi sur la famille, le code civil, la loi sur la protection sociale et juridique des enfants, le code pénal, le code de procédure pénale, le code de procédure civile, etc. La Convention relative aux droits de l’enfant représente un instrument cohérent de droit international. Son article 3, la disposition fondamentale et la plus générale, définit en termes généraux l’intérêt supérieur de l’enfant et le rôle que joue l’État en assurant le bien-être de l’enfant.
L’article 3 paragraphe 1 de la Convention relative aux droits de l’enfant se lit comme suit : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. » Le paragraphe 2 du même article énonce : « Les États parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées. »
En République tchèque, une attention notable est prêtée aux dispositions régissant les droits de l’enfant violés le plus fréquemment. Pour ce qui est des droits de l’enfant, le niveau de la législation tchèque reflétant le libellé de la Convention répond au standard européen élevé. Quant aux notions de « l’intérêt de l’enfant » ou « l’intérêt supérieur de l’enfant », il y a lieu d’admettre que leur définition adéquate est toujours sur la liste d’attente. En pratique, ce sont les agents des organes de protection sociale et juridique des enfants ou les juges des tutelles qui déterminent le contenu de la notion juridique indéterminée de « l’intérêt (supérieur) de l’enfant ». Conformément à l’article 3 de la Convention relative aux droits de l’enfant et en considération des situations diverses où l’enfant puisse se retrouver, cette notion
La défense des enfants à l’intérieur et à l’extérieur des frontières
doit être projetée dans toutes les normes juridiques, toutes les procédures ainsi que tous les projets et domaines impliquant un enfant mineur. Ainsi, le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant est présent dans la loi sur la famille ou dans la loi sur la protection sociale et juridique des enfants ; il est incorporé aussi dans d’autres textes législatifs, tels que l’amendement du code de procédure civile.
Le principe du bien-être de l’enfant appartient aux principes généraux fondamentaux du droit tchèque de la famille. De prime abord, il s’agit d’un principe qui ne devrait impliquer que les relations entre les parents et les enfants, le cas échéant celles d’accueil des enfants ou, en termes plus larges, le rapport de l’enfant et de l’État. Toutefois, il s’agit d’un principe de validité aussi générale qu’il se répercute sur les relations du droit de la famille de quelque type que ce soit. Dans la mesure où aucun milieu plus favorable à l’éducation de l’enfant que le milieu familial n’avait été mis en place jusque-là, il était nécessaire d’encadrer le statut juridique de l’enfant et sa protection par une réglementation spéciale. La notion du « bien-être de l’enfant » est mentionnée par la Déclaration des droits de l’enfant (1959) ainsi que par la Convention relative aux droits de l’enfant (1989). Elle est apparue dans l’ordre juridique tchèque pour la première fois dans l’article 41 de la loi sur la famille dans sa version en vigueur depuis le 1er août 1998. Depuis une période récente, on rencontre cette notion en forme modernisée dans l’article 5 de la loi sur la protection sociale et juridique des enfants en vertu duquel l’intérêt et le bien-être de l’enfant est la considération primordiale de sa protection sociale et juridique.
Les documents internationaux susvisés conçoivent le bien-être de l’enfant comme une notion plus large, notion qui détermine l’approche du législateur lors de la codification. En termes plus généraux, on pourrait définir le bien-être de l’enfant comme la création d’un milieu favorable aux enfants. En revanche, l’intérêt de l’enfant consiste plutôt dans la pratique d’application d’un droit déterminé dans un cas d’espèce concernant un enfant. Il est vrai que la notion de l’intérêt de l’enfant est souvent utilisée dans des dispositions spécifiques du droit ; il n’en est pas moins vrai que ces dernières n’en contiennent aucune définition (et, certes, il y a lieu de relever qu’elles ne le peuvent pas) tout en s’y référant dans des contextes divers. Du point de vue de l’organe de l’État, notamment d’un tribunal, qui prend une décision relative à un enfant, la portée et le sens de l’intérêt de l’enfant peuvent varier :
dans des cas où cela serait incompatible avec les intérêts d’un enfant mineur, dérivés de circonstances spécifiques reposant sur la situation particulière de l’enfant – telles que l’invalidité de l’enfant ;
dans des cas d’un conflit d’intérêts imminent (par exemple, entre un enfant mineur et un de ses parents) – là, pour protéger les intérêts de l’enfant, ce dernier se voit désigner un tuteur ad hoc.
A. Cadre juridique international et national
Tant les documents internationaux que les règles de fond nationales et, notamment, les règles de procédures internes doivent mettre en œuvre la maxime selon laquelle l’enfant mineur ne doit jamais être exclu d’une procédure quelconque du fait de sa minorité et, en conséquence, perdre la possibilité d’être entendu. L’enfant mineur est un élément central du droit de la famille et donc il est indispensable d’encadrer son statut juridique de manière spécifique afin de satisfaire à la protection de ses droits. La procédure judiciaire en matière de garde des mineurs figure parmi les moyens principaux de protection des enfants mineurs et d’exercice de leurs droits. La particularité de cette procédure consiste surtout en ce que l’enfant mineur jouit d’une protection spéciale de la part de l’État et de la société, protection qui plonge ses racines dans la Convention relative aux droits de l’enfant ainsi que dans d’autres prescriptions de droit matériel.
Dans son article 12, la Convention relative aux droits de l’enfant énonce le droit de l’enfant d’être entendu dans les termes suivants : « Les États parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. » Dans son paragraphe 2, le même article stipule : « À cette fin, on donnera notamment à l’enfant la possibilité d’être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l’intéressant, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un représentant ou d’une organisation appropriée, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale. »
Cette règle générale, présentant un caractère d’une norme de droit constitutionnel relative aux droits de l’homme, impose aux organes de l’État d’« entendre l’enfant ». Néanmoins, l’enfant doit être capable d’exprimer son opinion de manière compréhensible et répondant à son âge et à son degré de maturité.
Pour ce qui est des normes nationales de droit matériel consacrant le droit de l’enfant « d’être entendu », on peut citer :
l’article 31 paragraphe 2 de la loi sur la famille, qui se lit comme suit : « L’enfant qui, eu égard à son degré de maturité, est capable de discernement et d’analyser la portée des mesures l’intéressant doit toujours pouvoir exercer son droit d’être entendu. »
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l’article 31 paragraphe 3 de la loi sur la famille, aux termes duquel : « L’enfant a le droit à l’information nécessaire et le droit d’exprimer librement son opinion sur toute décision prise par ses parents et relative aux questions fondamentales l’intéressant. En outre, l’enfant a le droit d’être entendu dans toute procédure impliquant une décision sur telles questions. »
l’article 8 paragraphe 2 de la loi sur la protection sociale et juridique des enfants, ainsi libellé : « À des fins de protection sociale
et juridique, l’enfant capable de discernement a le droit d’exprimer librement son opinion dans toute procédure relative à toute question l’intéressant, et cela même sans la présence de ses parents ou des autres personnes légalement responsables de son éducation. Les opinions de l’enfant exprimées lors d’une procédure relative à une question l’intéressant sont dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. »
Il s’ensuit que l’organe de protection sociale et juridique des enfants doit tenir compte de la nécessité de prendre en considération les souhaits et les émotions de l’enfant, tout en ayant égard à l’âge et au degré de maturité de l’enfant, de manière à éviter toute atteinte ou perturbation du développement affectif et psychique de celui-ci. Par ailleurs, l’enfant a le droit d’obtenir de l’organe de protection sociale et juridique des enfants l’information sur toute question pertinente l’intéressant. L’organe de protection sociale et juridique des enfants doit apprécier le contenu de l’opinion de l’enfant indépendamment de la décision finale future.
B. Mise en œuvre processuelle du droit de l’enfant « d’être entendu »
L’enfant mineur est doté de capacité à agir, c’est-à-dire de capacité d’être partie à la procédure. Cette capacité n’est accordée aux mineurs que dans les limites définies par l’article 9 du code civil. Ainsi, les mineurs ne bénéficient de capacité à agir qu’à l’égard des actes correspondant, par leur nature, à la maturité intellectuelle et volitive de leur âge. Le droit tchèque ne prescrit aucun âge limite à compter duquel l’enfant serait capable de discernement ; il appartient au tribunal d’apprécier s’il est approprié d’établir l’opinion de l’enfant et par quel moyen.
La Convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, un autre document de droit international, fait également état du droit de l’enfant d’exprimer son opinion – dans son article 13. En vertu de cette disposition, l’autorité judiciaire ou administrative peut refuser d’ordonner le retour de l’enfant si elle constate que celui-ci s’oppose à son retour et qu’il a atteint un âge et une maturité où il se révèle approprié de tenir compte de cette opinion. L’enfant peut donc mettre en œuvre son droit d’être entendu et se prononcer sur la question où il désire vivre et avec lequel de ses parents. La procédure dont une partie est un enfant mineur présente des particularités significatives.
Partant, il y a lieu de se poser la question d’opportunité de mettre en place des juges spécialisés exclusivement à ce type de procédures. La République tchèque a déjà tenté de créer une justice spécialisée et a réalisé ce projet en matière du déplacement illégal des enfants de l’étranger vers la République tchèque. Une chambre spécialisée du Městský soud v Brně (Tribunal municipal de Brno) traite des demandes de retour des enfants illégalement déplacés pour l’ensemble du territoire de la République tchèque. Ce domaine étant sujet à une pression médiatique constante et produisant des tensions sociales considérables, la solution adoptée devrait assurer une action rapide et une approche uniforme du traitement de ces demandes.
Le tribunal constate l’opinion de l’enfant mineur soit par l’intermédiaire de son représentant légal ou de l’organe de protection sociale et juridique des enfants compétent, soit au moyen d’un dire d’expert, soit par voie de l’audition de l’enfant devant le tribunal. Il incombe au tribunal de déterminer les modalités pour établir l’opinion de l’enfant ; cette dernière est alors prise en considération eu égard à l’âge et au degré de maturité intellectuelle de celui-ci. Si l’enfant mineur est entendu par l’organe de protection sociale et juridique des enfants ou par un expert, il s’agit d’une « intermédiation » de son opinion et il convient de tenir compte du risque de distorsions de l’opinion de l’enfant. Le droit tchèque ne prescrit aucun âge limite à compter duquel l’enfant est présumé capable de discernement. Ainsi, la législation laisse les tribunaux libres à apprécier s’il est approprié d’établir l’opinion de l’enfant et par quel moyen.
C. Particularités de l’audition des enfants mineurs du point de vue psychologique
À l’heure actuelle, il est généralement reconnu que les enfants sont capables de fournir une déposition crédible. Cette position est reprise tant par les documents du droit international que par les dispositions du droit interne. Lorsque le tribunal entend un mineur, il doit tenir compte du degré de maturité mentale de celui-ci, s’abstenir de poser des questions suggestives ou captieuses et prendre en considération le fait que les enfants interrogés sont plus influençables que les adultes. Il arrive que les enfants cherchent à pressentir ou deviner les attentes de l’interrogateur et d’y « satisfaire ». Par conséquent, les questions à poser doivent être soigneusement formulées. À l’audition d’un enfant, le rôle significatif appartient aux influences extérieures et à l’ambiance générale de l’interrogatoire : ces circonstances sont essentielles pour décontracter l’enfant et pour assurer sa disposition à coopérer.
Le milieu dans lequel se déroule l’audition peut y contribuer sensiblement ; il convient donc de réfléchir si l’enfant mineur ne devrait être entendu plutôt dans un milieu plus idoine qu’une salle d’audience.