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La modernisation de la Cour suprême du Maroc

 

Monsieur Mohamed Abdelmounim EL MEJBOUD

Procureur général du Roi près la Cour suprême du Maroc


Le juge de cassation et les nouvelles technologies
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Monsieur le Président, chers collègues, Mesdames, Messieurs, avant de vous exposer un bref aperçu sur notre expérience relative à la modernisation de la Cour suprême, permettez-moi de dire quelques mots sur l’organisation judiciaire du Maroc, afin de connaître la place de la Cour suprême au sein de notre système.

Au Maroc, nous avons des juridictions de droit commun, des juridictions spécialisées et une juridiction d’exception.

Les juridictions de droit commun comprennent des Cours d’appel, des tribunaux de première instance et des juges communaux et d’arrondissement.
Les juridictions spécialisées sont des Cours d’appel de commerce et des tribunaux de commerce, ainsi que des tribunaux administratifs.

Notre seule juridiction d’exception est le tribunal permanent des forces armées royales.
La Cour suprême a été créée par un Dahir du 27 septembre 1957. Elle siège à Rabat, capitale du Royaume ; c’est la plus haute juridiction du Royaume et sa compétence s’étend sur tout le territoire national. Elle a pour mission essentielle de contrôler l’application des règles de droit par l’ensemble des juridictions et d’assurer ainsi l’unité de la jurisprudence.
La Cour suprême est présidée par un Premier Président et le Ministère public y est représenté par le Procureur général du Roi assisté des avocats généraux. Elle comprend des Présidents de chambre et des conseillers, un greffe, ainsi qu’un secrétariat général du Parquet.

Comme toute Cour suprême, elle se compose d’une chambre civile, d’une chambre commerciale, pénale, sociale, administrative, mais la particularité de notre Cour est qu’elle a aussi une chambre du statut du personnel successorale. Cette chambre connaît notamment des pourvois en cassation formés contre les arrêts rendus en matière de mariage, divorce, filiation et succession.
De même, notre chambre administrative connaît des pourvois de juridiction administrative, du recours pour excès de pouvoir contre des décisions administratives, comme toutes les chambres administratives, mais elle joue aussi le rôle d’une Cour d’appel pour les tribunaux administratifs car, au Maroc, nous n’avons pas encore de Cour d’appel administrative ni de Conseil d’Etat.

Depuis sa création en 1957 jusqu’en 1980, la gestion des pourvois à la Cour suprême était stable et ne présentait aucune anomalie. A partir de 1980, nous avons connu une augmentation considérable du nombre des affaires enrôlées, puisque nous sommes passés de 13 000 à environ 70 000 affaires en 1996. Cette augmentation vertigineuse est due à plusieurs facteurs, notamment au fait que l’accès au Juge de cassation marocain est très ouvert, que nous avons de plus en plus recours au Juge de cassation et, probablement, à cause des changements socio-économiques que subit notre pays.

Face au volume croissant des affaires, il était devenu impératif de remédier à cette situation. Pour y parvenir, il fallait doter la Cour d’une administration judiciaire moderne en phase avec l’évolution des nouvelles technologies.

De même, il devenait urgent de transférer la gestion administrative à une administration judiciaire performante, procédant ainsi à la séparation de l’activité judiciaire proprement dite de la gestion des dossiers et ce dans le but de décharger les Conseillers et les Présidents de chambres d’une lourde tâche pour laquelle ils ne sont ni formés et encore moins destinés.
Grâce à l’appui du PNUD et du Ministère de la justice, nous avons créé une administration chargée de moderniser le fonctionnement de la Cour, notamment par la formation des magistrats et agents du greffe en informatique et en apprentissage des langues étrangères. Nous avons commencé en 1998 par ce programme ; en informatique, par exemple, nous sommes passés de 86 personnes formées à 452 en 2003, en français, de 72 à 288 et en anglais, de 33 à 248.
De plus en plus de magistrats, d’agents du greffe et de fonctionnaires se consacrent à l’apprentissage des langues étrangères, ce qui leur ouvre l’accès à des documents dans toutes les langues, en mettant aussi à leur disposition un service de documentation qui les assiste dans leur travail de recherche, en permettant aux magistrats d’effectuer des stages au Maroc et à l’étranger et en ouvrant la Cour suprême sur le monde extérieur par la signature de coopération avec divers organismes et des conventions de jumelage avec d’autres Cours de cassation.
L’informatisation sera progressive et axée sur une gestion plus rationnelle et plus efficace des dossiers. Concrètement, l’administration judiciaire a établi des tableaux de bord, des indicateurs mensuels et annuels qui permettent aux responsables de mieux contrôler l’activité de leur Cour et de mieux assurer sa gestion.

L’évaluation de l’activité des magistrats s’effectue d’abord par un contrôle mensuel, où nous avons affaire à une chambre civile. Ce contrôle, qui date du mois d’avril, comprend le nom de tous les conseillers de cette chambre et, à l’examen de la situation, on peut s’apercevoir que, par exemple, le conseiller classé à la case 3 n’a aucun dossier en 1994 ni 1995 ni 1996 ni 1997 ni 1998 ; en revanche, il a trois dossiers en retard en 1999. Donc, nous allons l’inciter à résoudre ces dossiers puisqu’ils sont en retard.

A partir de 2002 jusqu’en 2004, il n’y a aucune anomalie dans l’activité de ce magistrat. Les affaires qu’il a jugées sont au nombre de 68, alors que la moyenne des affaires jugées par conseiller est de 40. Cette moyenne est calculée en divisant le nombre des affaires de la chambre par le nombre des conseillers ; il a donc jugé 28 affaires de plus.

C’est un contrôle de rendement, mais c’est un peu trop fort, car je tiens à préciser que cette évaluation tient compte de deux facteurs essentiels : premièrement, la préservation de la qualité des décisions et, deuxièmement, le respect absolu de l’indépendance du magistrat.
Aussi, chaque dossier est évalué selon son importance. Il n’est pas rare d’ailleurs de voir un conseiller rapporteur être déchargé momentanément de son activité pour consacrer tout son temps à résoudre un problème posé par une affaire juridiquement complexe.
Le contrôle annuel des affaires s’effectue selon le tableau qui vous est exposé. Il permet au responsable d’être au courant en temps réel de l’activité de la Cour ; il a pour but d’assurer la transparence dans la gestion des dossiers et, notamment, en mettant en exergue les éventuels retards enregistrés dans le prononcé des jugements.

Comme vous le voyez pour l’année 2003, nous sommes arrivés à ce que le nombre des affaires enregistrées soit égal ou presque à celles qui sont jugées.
Le contrôle par décennie a également son importance dans la mesure où il décrit l’état des lieux de notre Cour, car depuis les changements profonds qu’elle a subis et grâce à l’effort de nos magistrats, de nos greffiers et de nos fonctionnaires et à l’action de l’administration judiciaire, la Cour a pu rattraper son retard et réduire considérablement son stock au cours de cette année.
En 1993, nous avions 76 000 dossiers enregistrés et simplement 19 000 jugés alors que, actuellement, nous en avons 33 000 enregistrées et 43 283 jugés.

Grâce à l’action de cette administration judiciaire, nous avons pu relever ce défi.
Comment est-elle organisée ? Quels sont ses objectifs ?

Je me permets, Monsieur le Président, de vous demander de bien vouloir donner la parole à M. Mohamed Ouadi, ingénieur d’Etat et chef du département informatique pour répondre à ces questions.

 
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