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Rapport de la Cour suprême du Bénin sur le droit pénal de l’environnement

 

Monsieur Arsène CAPO-CHICHI

Chargé de mission à la Cour suprême du Bénin


Le droit de l’environnement
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Introduction

Les développements que nous proposons sur le droit pénal béninois de l’environnement et les influences que le droit international a pu avoir sur sa formation auront pour repère les définitions ci-après que nous retenons parmi les nombreuses que suggère la revue documentaire sélective consultée.

Il s’agit de :
- d’une part, celle de « l’environnement naturel » qui est, selon la conception francophone retenue par la norme ISO 14001:1996, « le milieu dans lequel un organisme fonctionne, incluant l’air, l’eau, la terre, les ressources naturelles, la flore, la faune, les êtres humains et leurs interrelations » ;
- d’autre part, celle de l’article 2 de la loi n°98-030 du 12 février 1990 portant loi-cadre sur l’environnement en République du Bénin qui dispose que « l’environnement, c’est l’ensemble des éléments naturels et artificiels ainsi que des facteurs économiques, sociaux et culturels qui influent sur les êtres vivants et que ceux-ci peuvent modifier ».

Le Bénin est un pays dont les économies restent largement tributaires de l’exploitation directe des ressources naturelles. Le troisième Recensement Générale de la Population et de l’Habitat réalisé en 1999 rend compte à ce propos que près de la moitié des actifs occupés (49%) travaillent, dans les secteurs de la production agricole, de la chasse, de la pêche et la coupe de diverses essences forestières utilisées dans les travaux de construction et dans la production des énergies pour la cuisine traditionnelle.

L’exploitation du sable marin est aussi très intense pour les besoins de construction des bâtiments et dans les travaux publics.

L’intervention du législateur pour la protection des espaces ou pour la préservation de certaines espèces qui les peuplent s’est avérée nécessaire à cause de la surexploitation très remarquée des ressources naturelles.

L’intérêt marqué des pouvoirs publics pour l’environnement caractérisé ces dernières années par la mise en place de plusieurs institutions en charge de sa gestion a pu faire penser que la préoccupation de la protection de l’environnement au Bénin n’a connu le jour qu’avec l’ère du renouveau démocratique.

La Constitution dont s’est doté celui-ci le 11 décembre 1990 prescrit en effet en son article 27 « le droit de tout citoyen à un environnement sain qu’il a, avec l’Etat, pour obligation de défendre et de protéger ».

Mais, en réalité, le Bénin avait depuis les temps ancestraux certaines pratiques socioculturelles de la gestion des problèmes environnementaux qui, à travers notamment de strictes et sévères règlementations et des droits d’usage édictés par le pouvoir traditionnel, permettaient de protéger des sections de cours d’eau et de forêts sacrées.

Par ailleurs, le législateur béninois, aussi bien pendant la période de l’administration coloniale que durant celle qui a, de 1960 à 1990, précédé l’ère du renouveau démocratique, n’a pas manqué de se préoccuper de l’organisation de la protection de l’environnement notamment en prenant des actions pour la conservation de ses ressources et en assortissant les mesures édictées de sanctions applicables, le cas échéant.

La règlementation établie ne peut cependant pas, rigoureusement, s’analyser comme entrant dans une logique de codification d’un programme de protection de l’écosystème dans sa globalité. Car, les sources légales d’organisation de la protection ou de la répression des atteintes au droit de l’environnement avant 1990 ont, en général, été des textes sectoriels pris en vue notamment de la protection ou de la conservation de certains espaces, activités, espèces ou essences.
Les actions qui traduisent un engagement réel des autorités dans la mise en place d’un encadrement juridique cohérent aux fins de la préservation des ressources naturelles dans une logique de développement durable n’ont été prises véritablement qu’au cours de ces quinze ou vingt dernières années.

Deux périodes marquent donc l’organisation de la protection de l’environnement par le législateur béninois :

- la période de la réglementation sectorielle ;
- la période de la réglementation pour un développement durable.
Dans l’un ou l’autre cas, la réglementation mise en place édicte des interdictions, des autorisations préalables ou des limitations de quantités de ressources à prélever.

I. Le cadre réglementaire de la protection de l’environnement au Benin

L’action du législateur a d’abord porté sur les règles qui se préoccupent surtout de la sauvegarde ou du renouvellement des produits recueillis ou des espèces détruites. La réglementation élaborée a porté aussi bien sur la faune aquatique et la pêche que sur la faune terrestre et la gestion cynégétique. L’hygiène publique a aussi été codifiée.

a- Faune aquatique et pêche

La gestion des ressources aquatiques semble être l’une des préoccupations majeures des gouvernements. En effet, si la réglementation s’est montrée moins présente dans d’autres domaines de la protection de l’environnement, il n’en a pas été ainsi en ce qui concerne la pêche.
Le Bénin a ratifié :
- le 02 juillet 1968, la Convention internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique, adoptée le 14 mai 1968 à Rio de Janeiro ;
- le 31 mai 1983, la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction ;
- la Convention relative à la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage, adoptée le 23 juin 1979 à Bonn.

On peut aussi citer les textes ci-après dont il a hérité en accédant à l’indépendance en août 1960 :
- l’arrêté du 15 mai 1914 promulguant en Afrique occidentale française le décret du 12 avril 1914 portant réglementation de la pêche et de l’exploitation industrielle de la baleine dans les colonies françaises ;
- le décret du 29 juillet 1924 interdisant en AOF la pêche pratiquée à l’aide d’explosifs, de poisons ou autres drogues ; et
- le décret n° 207 du 30 janvier 1950 interdisant l’utilisation des armes à feu ou des explosifs comme moyens de pêche.

L’importance que le pouvoir public a toujours accordée à la gestion des ressources aquatiques s’est manifestée aussi dans la prise :
- de l’ordonnance 73-41 du 5 mai 1973, portant réglementation de la profession de mareyeur au Bénin ;
- du décret n° 204 P.C. /M.D.R.C., du 1er. Octobre 1964 instituant un contrôle des produits de la pêche et des conditions de commercialisation de ces produits ;
- de l’ordonnance n°20 P.R./M.D.R.C du 25 avril 1966 portant réglementation de l’exercice de la pêche dans les eaux continentales du Dahomey.

Le pouvoir exécutif a, en outre, constamment exprimé son contrôle sur la gestion des ressources aquatiques en prenant chaque fois que de besoin des arrêtés subséquents.

On pourrait citer :
- l’arrêté n°23 M.D.RC./S.P. du 8 février 1968, déterminant la taille minimum des crevettes de lagunes, destinées à un traitement industriel ;
- l’arrêté interministériel n° 100 M.T.P.T.P.T./M.D.R.C., du 31 juillet 1968 fixant les conditions de l’exercice de la pêche dans les eaux territoriales du Dahomey ;
- l’arrêté N°152 M.D.R.C.!S.P. du 16 septembre 1970 portant enlèvement des « acadjas » du lac Ahémé et des lagunes de Ouidah et de Grand-Popo ;

Le « acadja » est une méthode traditionnelle de pèche par trappe qui consiste en un assemblage de branchages feuillus dont le pourrissement attire certaines espèces de poissons telles que les tilapias qui y élisent leur demeure.

l’arrêté interministériel n° 5 M.D.RC./M.E.F. du 16 janvier 1974, portant réglementation de la pêche et de la commercialisation des crevettes des lacs et lagunes de Dahomey.

b- Faune terrestre et gestion cynégétique

En matière de protection de la faune terrestre et de la gestion cynégétique, le Bénin s’est doté de :
- la loi n° 87-¬014 du 21 septembre 1987, portant réglementation de la protection de la nature et de l’exercice de la chasse en République Populaire du Bénin ;
- la loi n° 93-011 du 03 août 1993 portant conditions de l’exercice de la Chasse et du Tourisme de Vision en République du Bénin.

Le souci de mieux protéger la faune et la flore sauvage a, par ailleurs, conduit à l’adoption du décret n° 94-64 du 21 mars1994, portant classement du Parc National de la Penjari en Réserve de la Biosphère.

c- Gestion forestière

Comparativement à la gestion de la faune aquatique et à celle de la pêche, la réglementation en matière de gestion forestière est moins abondante en droit béninois de l’environnement.
C’est seulement en 1987 que le Bénin a connu sa première réglementation sur les forêts avec la loi n° 87-012 du 21 septembre 1987 portant Code forestier.
Les actes pris en matière de gestion forestière, que ce soit avant ou après 1987, visent spécialement à empêcher la destruction des forêts par une exploitation anarchique ou par les feux de brousse.
L’adoption des textes ci-après rentre dans cette préoccupation :
le décret n° 82-435 du 30 décembre 1982 portant interdiction des feux de brousse et des incendies de plantations ;
l’arrêté n° 388 M.F.E.E.P./E.F.C. du 22 juillet 1981, portant interdiction de la tronçonneuse pour le sciage du bois ;
l’arrêté n°343 MOR/MCA T/DC/CC/SA du 16 août 1996 portant interdiction de l’exportation du bois de teck brut et de charbon de bois.


d- Conservation des écosystèmes

1 – L’eau

Le Bénin a ratifié ou adhéré à plusieurs conventions internationales en matière de protection et de gestion de l’eau, notamment :
1) la Convention sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion, signée à Londres, le 29 décembre 1972, et à laquelle le Bénin a adhéré le 25 février 1975 ;
2) la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires, adoptée le 2 novembre 1973 à Londres et ratifiée par le Bénin le 01 novembre 1985 ;
3) la convention des Nations Unies sur le droit de la mer, ouverte à signature le 10 décembre 1982 à Montego-Bay, signée par le Bénin le 30 août 1983, et ratifiée en 1999 ;
4) la Convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, adoptée le 29 novembre 1969 à Bruxelles. Le Bénin y a adhéré le 30 janvier 1986 ;
5) la Convention internationale sur l’intervention en haute mer en cas d’accident entraînant ou pouvant entraîner une pollution par les hydrocarbures, adoptée le 29 novembre 1969 à Bruxelles, et à laquelle le Bénin a adhéré le 30 janvier 1986.

Cet arsenal juridique est complété par notamment :
- la loi n°87 016 du 21 septembre 1987 portant code de l’eau en République Populaire du Bénin, actuellement en cours d’actualisation ;
- le décret n° 86-516 du 15 décembre 1986 portant définition des responsabilités en matière de gestion du littoral.

2 – L’air

En matière de réglementation de l’air, le Bénin a, jusqu’à une époque récente, préféré s’en tenir aux conventions internationales et a ratifié :
1) le Traité sur les principes régissant les activités des Etats en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra atmosphérique ;
2) la Convention de Vienne pour la protection de la couche d’ozone, signée par le Bénin le 16 mars 1993 ;
3) le Protocole de Montréal relatif aux substances qui appauvrissent la couche d’ozone, également signée par le Bénin le 16 mars 1993.

3- Les sols

En absence jusqu’à une époque récente aussi de toute politique générale des sols, certaines activités socio-économiques liées à la gestion du sol sont codifiées. Ainsi, la prospection, la recherche, l’exploitation, la possession, la détention, le transport, la circulation et le commerce des substances minérales sont réglementés par la loi n° 83-003 du 17 mai 1983 portant Code Minier, qu’a remplacé la Loi n°2006-17 du 27 mars 2007 portant Code minier et fiscalités minières en République du Bénin.

4- Les nuisances

Les sources des nuisances sont multiples. La lutte contre les nuisances est un domaine où la réglementation se présente à la fois sous une forme générale de la protection de l’environnement et sous une forme sectorielle prenant respectivement en compte les produits dangereux dont les produits chimiques et les substances explosives, les déchets dangereux, les établissements classés, le bruit et les essais nucléaires. Ces problèmes sont abordés de manière cohérente par la loi cadre sur l’environnement que nous présenterons dans la suite de nos développements.

5- Hygiène et santé

a- Généralités

La réglementation en matière d’hygiène et de santé s’appuie en grande partie sur la loi N° 87-015 du 21 septembre 1987 portant code de l’hygiène publique. Cette loi est considérée comme l’une des toutes premières sources générales du droit de l’environnement au Bénin.
En effet, à travers l’hygiène sur les voies publiques, l’hygiène des habitations, l’hygiène des denrées alimentaires, l’hygiène sur les établissements classés, les marchés et les activités commerciales en plein air, l’hygiène des places publiques et des plages, l’hygiène concernant l’eau pour diverses utilisations, l’hygiène des installations industrielles et l’hygiène relative aux contrôles sanitaires aux frontières, ainsi que celle relative à la lutte contre le bruit et la pollution du milieu naturel, la loi couvre presque tous les domaines de la réglementation environnementale.

L’intérêt de cette loi, c’est d’être aussi détaillée que possible sur les différentes questions environnementales qu’elle réglemente.
Les actes réglementaires principaux qui concourent à l’application effective de cette loi sont :

- le décret n° 97-616 du 18 décembre 1997 portant application de la loi n°87-015 du 21 septembre 1987 portant Code d’Hygiène Publique ;
- le décret n° 97-624 du 31 décembre 1997, portant structure, composition et fonctionnement de la Police Sanitaire.

b- Denrées alimentaires

La protection des denrées alimentaires est assurée au Bénin par la loi n° 84-009 du 15 mars 1984 sur le contrôle des denrées alimentaires, mais aussi et surtout par la loi n°87-015 du 21 septembre 1987 portant Code de l’hygiène publique au chapitre III de son titre II (articles 36 à 45) et en son article 156 pour ce qui est des pénalités.

2-La réglementation pour un développement durable.

Les politiques sectorielles de règlementation ont ainsi, pendant longtemps, pris le pas sur les soucis environnementaux globalement pensés. Mais, avec l’entrée en vigueur de la loi fondamentale du 11 décembre 1990, la préoccupation environnementale est deve¬nue constitutionnelle comme souligné plus haut.
Les articles 28, 29, 74 et 95 de la Loi fondamentale établissent les droits et devoirs qui se rapportent à environnement, tandis que la loi-cadre, n°98-030 du 12 février 1999 sur l’environnement a, soit repris, en l’actualisant, un pan important des dispositions relatives à des secteurs régis par des actes particuliers, soit organisé certains secteurs jusque là omis par le législateur national. Les domaines qui suivent sont notamment concernés.

- Des sols et sous-sols

Le Bénin ne disposait pas d’un régime juridique général pour les sols. Il a retenu l’attention des rédacteurs de la loi-cadre sur l’environnement qui en ont fait la substance des dispositions du chapitre I du titre Il de cette législation.


- De l’air

Le Bénin n’a pris aucune réglementation interne relative à la pollution de l’air avant que soit consacré à la matière le chapitre IV du titre II de la loi-cadre sur l’environnement.

- Des établissements classés

Depuis l’accession du Bénin à l’indépendance, aucun acte n’a été pris pour réglementer spécifiquement les établissements classés. La réglementation de ces établissements se trouvait éparpillée dans des textes qui régissent plus spécialement d’autres activités socio-économiques. La loi-cadre sur l’environnement a corrigé ce vide juridique en consacrant le chapitre Il de son titre IV aux installations et établissements classés, abrogeant ainsi le décret du 20 décembre 1933, relatif aux servitudes autour des magasins à poudre, artifices ou explosifs en Afrique occidentale française.

- Des déchets dangereux

A travers les articles 28 et 29 de la Constitution de décembre 1991 le Bénin a clairement exprimé son option pour une protection du territoire national contre toute sorte de trafic relatif aux déchets dangereux.
Art 28. -Le stockage, la manipulation et l’évacuation des déchets toxiques ou polluants provenant des usines et autres unités industrielles ou artisanales installées sur le territoire national sont réglementés par la loi.
Art 29. -Le transit, l’importation, le stockage, l’enfouissement, le déversement sur le territoire national des déchets toxiques ou polluants étrangers et tout accord y relatif constituent un crime contre la Nation. Les sanctions applicables sont définies par la loi.
Le Bénin a, en outre :
1) ratifié, le 17 juillet 1997, la Convention de Bamako du 29 janvier 1991 sur l’interdiction d’importer en Afrique des déchets dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontières et la gestion des déchets dangereux produits en Afrique ;
2) adhéré, le 16 octobre 1997, à la Convention de Bâle du 22 mars 1989 sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination.
Les dispositions du chapitre 1 du titre IV de la loi-cadre sont consacrées au traitement, à l’entreposage, à l’élimination et au transfert des déchets. Ils s’appliquent donc pour autant qu’elles ne sont pas en conflit avec les conventions suscitées.
En application de cette loi-cadre plusieurs décrets ont été élaborés pour fixer et préciser les normes à respecter en vue de la sauvegarde et de la protection de l’environnement en ce qui concerne les différents secteurs ou activités couverts par les définitions proposées dans notre introduction.
Au nombre des décrets pris en application de la loi cadre et visant les normes relatives au cadre de vie au du Bénin, on pourrait citer ceux fixant :

- les normes de la qualité de l’air (Décret n°2001-110 du 04/04/01) ;
- les normes de qualité des eaux résiduaires (Décret n°2001-109 du 04/04/01) ;
- la réglementation du bruit (Décret n°2001-294 du 08/08/01) ;
- les normes de gestion des déchets solides et de gestion des huiles usagées ;
- la gestion rationnelle des déchets biomédicaux (Décret n° 2002-484 du 15/11/02) ;
- la question des déchets solides, des matières de vidange et des huiles usagées.

En ce qui concerne la répression de la délinquance environnementale, les articles 106 à 122 du titre VI de la Loi cadre énoncent les modalités de la recherche et de la constatation des infractions et de leur incrimination ainsi que le quantum des amendes et celui des temps de privation de liberté auxquelles s’exposent les contrevenants aux diverses prohibitions qu’édicte ladite loi cadre.

Au total, la Loi-cadre sur l’environnement a permis :
d’exprimer l’attachement du Bénin aux principes et accords internationaux en considérant l’environnement béninois comme patrimoine national partie intégrante du patrimoine de l’humanité ;
d’asseoir le cadre pour légiférer sur les principes fondamentaux universellement reconnus que sont : la participation des acteurs à la décision, la prévention et l’anticipation des actions pouvant porter atteinte à l’intégrité de l’environnement ; d’organiser, à travers des décrets d’application, les outils de gestion de l’environnement comme l’Evaluation des Impacts Environnementaux, l’Evaluation Environnementale Stratégique, l’Audit d’Environnement, l’Audience Publique sur l’Environnement, autant de procédures dont l’ignorance peut faire encourir de sanctions.

II- La répression des atteintes à l’environnement

Les dispositions qu’aménagent les conventions internationales en vue de la répression des atteintes à l’environnement portent surtout sur des confiscations, des destructions ou la mise en jeu de la responsabilité civile. L’organisation des sanctions pénales est plutôt recommandée aux Etats partie.

Ainsi est-il dit par exemple au point 3 de l’article 9 de la convention de Bâle sur les mouvements des déchets dangereux que « lorsqu’un mouvement transfrontière de déchets dangereux ou d’autres déchets est considéré comme trafic illicite par suite du comportement de l’importateur ou de l’éliminateur, l’Etat d’importation veille à ce que les déchets dangereux en question soient éliminés d’une manière écologiquement rationnelle par l’importateur ou, s’il y a lieu, par lui-même… ».

Le point 5 du même article prescrit que « chaque Partie adopte les lois voulues pour interdire et réprimer sévèrement le trafic illicite.. ».
Le droit pénal de l’environnement dont s’est doté le Bénin tire son origine, d’une part de la mise en œuvre de recommandations similaires et, d’autre part, des dispositions répressives dont le législateur national assortit les diverses réglementations initiées en vue de la protection de l’environnement.

La plupart des textes sectoriels, tout comme la réglementation générale procédant de la loi-cadre sur l’environnement, définissent des incriminations auxquelles sont associées les sanctions pénales applicables.

Les sanctions pénales à appliquer pour réprimer une infraction contre l’environnement sont parfois aussi de règles spécifiques ou procèdent de renvois à des normes du code de procédure pénale, du code pénal ou de la loi- cadre sur l’environnement, entre autres.

A- S’agissant des règles spécifiques.

Outre les peines d’emprisonnement ou d’amendes susceptibles d’être appliquées à tel ou tel type d’infractions, les règles spécifiques portent surtout sur les agents habilités à constater la perpétration de l’acte délictuel.
En dehors des officiers de police judiciaires, de nombreuses procédures du droit pénal environnemental donnent compétence à des personnes ayant une certaine maîtrise ou des informations jugées appropriées de la chose environnementale pour constater les infractions ou même pour établir les procès verbaux.

Des personnes étrangères à la magistrature ont même parfois pouvoir pour siéger à la suite des représentants du Parquet.
Les dispositions ci-après sont citées à titre d’exemple à ce propos.
Extraits de la Loi n° 87-14 du 21 septembre 1987 portant réglementation de la protection de la nature et de l’exercice de la chasse en République Populaire du Bénin.

Article 40 : Les Agents des eaux, forêts et chasses non assermentés arrêtent tout Individu trouve en infraction a la réglementation de la chasse et de la protection de la nature et dressent le constat du délit.
Article 43 : Les agents forestiers en uniforme ou munis d’une carte professionnelle peuvent procéder à la visite des véhicules et autres engins de transport, ainsi qu’à la fouille de tout objet susceptible de contenir de la viande de chasse. A cette fin, ils peuvent dresser des barrages sur la voie publique en dehors des agglomérations. Ils ont libre accès dans les maisons, cours et enclos …..Ils ont libre accès aux quais fluviaux et maritimes, dans les gares et sont autorisés à parcourir librement les voies de chemin de fer pour la recherche des infractions. Ils ont droit de requérir les autres éléments des forces armées populaires….
Article 48 : Les actions et poursuites sont exercées par le Directeur des Eaux, Forêts et Chasse ou son représentant devant les juridictions.
Article 49 : Les agents forestiers assermentés ont le droit d’exposer l’affaire devant le tribunal et sont entendus à l’appui de leurs conclusions. Ils siègent à la suite du Procureur et de ses substituts en uniforme et découverts.
Extraits de l’Ordonnance n° 68-38/P.R./M.T.P.T.P.T du 18 juin 1968, modifiée par ordonnance n° 69-49/P.R./M.A.E. du 9 décembre 1969, portant code de la marine marchande.
Article 289 : Les délits en matière de pêche maritime sont recherchés et constatés par :
les représentants qualifiés de l’autorité maritime ;
les officiers de police judiciaire ;
les officiers et officiers mariniers commandant les bâtiments ou embarcadères de la République du Dahomey, les gendarmes, les officiers et maîtres de port et les autres agents spécialement habilités à cet effet.
Ils donnent lieu à l’établissement de procès-verbaux.
Article 290 : Les procès-verbaux établis par les agents énumérés à l’article précédent font foi jusqu’à preuve du contraire.
Les procès-verbaux sont transmis directement par leurs auteurs à l’autorité maritime qui saisit le Procureur de la République près du Tribunal dont relève sa résidence….
Article 291 : Le Ministère public ne peut engager les poursuites qu’au vu des conclusions de l’autorité maritime ou à l’expiration d’un délai de quinze jours après qu’il aura réclamé ces conclusions par le Tribunal.
La loi cadre sur l’environnement reprend la logique de ces énonciations dans les deux articles ci-après relatifs à la recherche et à la constatation des infractions.
Article 106 : Sont habilités à rechercher et à constater les infractions aux dispositions de la présente loi et des textes pris pour son application, outre les officiers et agents de police judiciaire :
- les agents assermentés des administrations chargées de la protection de l’environnement ;
- les agents habilités par des lois spéciales.
Article 107 : Les infractions en matière d’environnement sont constatées par des procès verbaux. Ceux-ci font foi jusqu’à preuve du contraire. Ils sont adressés au Ministre.

La logique de la double procédure pénale et administrative applicable pour sanctionner une même infraction contre l’environnement qui existe dans certaines règlementations sectorielles est prise en compte par la loi cadre dans son Article 111qui dispose que : « Les peines prévues par la présente loi ne font pas obstacle au retrait ou à la révocation, par les autori¬tés compétentes, des certificats, permis ou autorisations qu’elles ont eu à délivrer ».

B- A propos des renvois à des sanctions pénales préexistantes

Des exemples en sont fournis par les dispositions ci-après.
Le décret n° 2003-330 du 27 août 2003 portant gestion des huiles usagées en République du Bénin, dispose en son article 36 relatif aux dispositions pénales que : « Les infractions aux dispositions du présent décret sont recherchées, constatées/poursuivies et réprimées conformément aux dispositions de l’article 106 de la loi n° 98-030 du 12 février 1999, portant loi-cadre sur l’environnement en République du Bénin ».

L’arrêté n° 601 MDR/DÇ/DFRN/SA du 8 octobre 1992, portant application en République Bénin de la Convention sur le Commerce International des espèces de/aune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) dispose en son article 11 : « Toute personne avant enfreint aux dispositions du présent arrêté sera frappée par les sanctions prévues par la réglementation en vigueur en République du Bénin.
Les produits ayant fait l’objet de malversation seront confisqués. Les amendes suivantes seront appliquées en fonction des infractions comme ci-après :

a) une amende de 50.000 à 500.000 F.CF A en cas de non respect des conditions stipulées sur un permis Cites ou un certificat d’origine ;
b) une amende de 100.000 à 1.OOO.OOO F.CFA en cas d’utilisation d’un permis Cites ou d’un certificat d’origine falsifié ou non valable, ou modifié sans autorisation. »

 
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