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PRIX DE l’AHJUCAF POUR LA PROMOTION DU DROIT
L’AHJUCAF (Association des hautes juridictions de cassation ayant en partage l’usage du français) crée un prix destiné à récompenser l’auteur d’un ouvrage, d’une thèse ou d’une recherche, écrit ou traduit en français, sur une thématique juridique ou judiciaire, intéressant le fond du droit ou les missions, l’activité, la jurisprudence, l’histoire d’une ou de plusieurs hautes juridictions membres de l’AHJUCAF.
Président de chambre à la Cour suprême du Congo
La République du Congo, de par son hydrographie et sa pluviométrie, est dotée d’une flore et d’une faune riches et abondantes, de nombreux cours d’eau et un littoral de près de 200 km dont l’exploitation exagérée a depuis plusieurs décennies, provoqué une politique de protection de la part du Gouvernement qui a de ce fait pris diverses mesures d’ordre institutionnelles, législatives et réglementaires qui constituent aujourd’hui le droit de l’environnement ;
Ce droit de l’environnement comprend des textes qui peuvent être sériés en deux catégories :
ceux relatifs aux ressources naturelles, à savoir la faune, la flore, les ressources pastorales, les ressources hydrauliques qui comprennent aussi les ressources marines, et
ceux relatifs aux pollutions et aux nuisances.
L’article 1er de la loi n°003/91 du 23 avril 1991 sur la protection de l’environnement dispose :
« La présente loi a pour objet, dans le ressort territorial des espaces aérien et terrestre et des eaux sous juridiction congolaise de :
« - renforcer la législation existante portant essentiellement sur la « protection et la préservation de la faune et de la flore sauvages, des ressources marines et fluviales, l’exploitation des installations « dangereuses, insalubres ou incommodes, l’aménagement et l’urbanisme,
« - gérer, maintenir, restaurer et protéger ou conserver /es ressources « naturelles, le patrimoine culturel, naturel et historique ;
prévenir et lutter contre les atteintes à l’environnement et à la santé « des personnes ou à leurs biens ».
L’environnement est, de manière générale, considéré comme l’ensemble des éléments physiques, biophysiques naturels ou artificiels et des facteurs économiques, sociaux qui ont un impact sur la vie, la transformation et le développement du milieu, des ressources naturelles ou non, des activités humaines.
Sont ainsi réglementés, les sols et le sous-sol, les eaux continentales, le littoral et les eaux maritimes, l’atmosphère, les établissements humains, les installations classées dangereuses, insalubres ou incommodes et les activités polluantes (déchets, établissements classés, substances chimiques nocives ou dangereuses, nuisances sonores ou olfactives) les ressources naturelles et la conservation de la diversité biologique.
Le droit pénal national de l’environnement se trouve essentiellement dans la Constitution, le code de l’environnement et dans les dispositions spécifiques qui concernent certains domaines.
Elle dispose en son article 35 que tout citoyen a droit à un environnement sain, satisfaisant et durable et a le devoir de le défendre.
L’État veille à la protection et à la conservation de l’environnement.
Elle renvoie à la loi la fixation des conditions de stockage, de manipulation, d’incinération et d’évacuation des déchets toxiques, polluants ou radioactifs provenant des usines et autres unités industrielles installées sur le territoire national, et pose le principe de la compensation en cas de pollution ou de destruction de l’environnement.
Par contre dans son article 37, la Constitution érige en crime punissable, le transit, l’importation, le stockage, l’enfouissement, le déversement dans les eaux continentales et les espaces maritimes sous juridiction nationale, l’épandage dans l’espace aérien des déchets toxiques, polluants, radioactifs ou de tout autre produit dangereux en provenance ou non de l’étranger. (art 36).
La Constitution punit comme crime imprescriptible de pillage, tout acte, tout accord, toute convention, tout arrangement administratif ou tout autre fait qui a pour conséquence directe de priver la nation de tout ou partie de ses propres moyens d’existence tirés de ses ressources naturelles (article 38).
Si la Constitution définit certaines infractions, elle renvoie cependant à la loi, la fixation des peines.
En matière pénale, la République du Congo est encore régie par le Code pénal français applicable en Afrique Équatoriale Française ; ce texte qui accuse un certain âge, est totalement muet sur les problèmes environnementaux. Le Gouvernement Congolais, conscient de ce problème, a mis en place des Commissions chargées de réviser ce code pénal et d’autres textes touchant divers domaines tels que la procédure pénale, la procédure civile et le code de la famille. Il est certain que le futur code pénal congolais accordera une place non négligeable aux questions liées à l’environnement qui est aujourd’hui une préoccupation majeure de l’humanité ; nous le citons parce que certaines dispositions du code de l’environnement renvoient au code pénal la sanction de certains faits particulièrement graves.
C. Le Code de l’environnement
Il rassemble un ensemble de textes législatifs et réglementaires, mais aussi l’inventaire d’un certain nombre d’instruments internationaux qui se rapportent à l’environnement ;
Nous avons notamment la loi n°003/91 du 23 avril 1991 sur la protection de l’environnement qui est, pouvons nous dire, la loi environnementale fondamentale, puisque dans son corpus, elle traite de la protection des établissements humains, de la protection de la faune et de la flore, de la protection de l’atmosphère, de l’eau, des sols, dispose dans son article 39 que « /es dispositions de /a présente loi sont applicables aux usines, magasins, manufactures, ateliers, dépôts, chantiers, carrières, et de manière générale aux installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la santé, la sécurité et la salubrité publique, soit pour l’agriculture, soit pour la conservation des sites ou monuments, soit pour la protection de la nature ou de l’environnement » .
Elle interdit le dépôt ou l’abandon des déchets urbains dans des conditions favorisant le développement des vecteurs de maladies ou susceptibles de provoquer des dommages aux personnes et aux biens.
Elle interdit également à toute personne physique ou morale, publique ou privée, d’importer ou de faire importer, de faciliter ou de tenter de faciliter l’importation de déchets nucléaires et des déchets industriels dangereux. Elle réglemente l’importation, la production, le commerce et l’utilisation des substances chimiques potentiellement toxiques ainsi que les stupéfiants.
Elle traite également des nuisances sonores.
La loi n°48/83 du 21 avril 1983 définissant les conditions de la conservation et de l’exploitation de la faune sauvage. La loi n°16/2000 du 20 novembre 2000 portant code forestier, dont les objectifs sont :
d’instituer un cadre juridique approprié pour assurer la gestion durable des forêts et des terres forestières sur l’aménagement rationnel des ressources ;
de définir le domaine forestier national et de déterminer les critères et les normes d’organisation et de gestion concertée et participative ;
de concilier l’exploitation des produits forestiers avec les exigences de la conservation du patrimoine forestier et de la diversité biologique en vue d’un développement durable (art.ler).
La loi n°13/2003 du 10 avril 2003 portant code de l’eau dont l’objet est la mise en œuvre d’une politique visant à :
assurer une utilisation rationnelle de la ressource en eau... ;
prévenir les effets nuisibles de l’eau ; lutter contre la pollution de l’eau (art 2) ;
L’ordonnance n°22-70 du 14 juillet 1970 sur la mer territoriale, la pollution des eaux de la mer, l’exercice de la pêche maritime, l’exploitation des produits de la mer.
La loi n°2-2000 du 1er février 2000 portant organisation de la pêche maritime.
La loi n°9-2004 du 26 mars 2004 portant code du domaine de l’État.
Comme nous l’avons signalé ci-devant, le droit pénal de l’environnement est totalement dépendant du droit de l’environnement, sauf dans quelques rares cas où il renvoie certains faits à la sanction du code pénal général, par exemple, en cas d’incendie volontaire ayant causé des pertes en vies humaines (art.138 de la loi n°16-2000 du 20 novembre 2000 portant code forestier).
La particularité du droit pénal de l’environnement se situe au niveau de la recherche et de la constatation des infractions, mais aussi au niveau du traitement de celles-ci.
LA RECHERCHE ET LA CONSTATATION DES INFRACTIONS
Le code de procédure pénale dispose en son article 15 : « La police judiciaire comprend :
1°/- les officiers de police judiciaire ;
2°/- les fonctionnaires et agents auxquels sont attribuées par la loi certaines fonctions de police judiciaire » ;
En matière de protection de l’environnement, la recherche et la constatation des infractions, voire leur poursuite, sont effectuées par des agents assermentés des eaux et forêts, l’autorité maritime, les officiers commandant les bâtiments de l’Etat, les agents de douane, les personnes chargées d’une mission de contrôle à bord des navires dûment habilitées par le Directeur de la marine marchande et assermentées, les vétérinaires et autres agents habilités des services d’hygiène publique, les agents de l’administration des douanes en ce qui concerne l’occupation du domaine public en général qui exercent des fonctions de police judiciaire parallèlement avec les officiers de police judiciaire de la police et de la gendarmerie. Ces compétences sont également reconnues à certains fonctionnaires évoluant dans les administrations centrales des eaux et forêts, de la pêche, de la santé, des mines et énergie, de l’hydraulique, des transports et aviation civile, des travaux publics et construction ; ces autorités habilitées, ont un large droit d’accès à tout endroit susceptible de renfermer des preuves, ou à titre préventif pour y exercer une certaine surveillance ; elles ont également le pouvoir de saisir, de confisquer ou de mettre sous séquestre les objets constituant des éléments de preuve ou des commencements de preuve ;
La constatation des infractions se fait par procès-verbaux ou par témoin.
Notons que les procès-verbaux ainsi dressés font foi jusqu’à inscription de faux sauf ceux dressés en matière maritime qui font foi jusqu’à preuve contraire.
L’INITIATIVE DES POURSUITES
La loi n°48/83 du 21 avril 1983 définissant les conditions de la conservation et de l’exploitation de la faune sauvage dispose en son article 51 alinéa 2 : « Dans /e cadre de l’application de la présente loi, les officiers de police judiciaire évoluant dans les postes de sécurité publique peuvent contrôler tous les produits de chasse et, en cas d’infraction, dresser procès-verbal dont l’original est adressé au responsable des eaux et forêts pour des poursuites » ;
Selon le droit congolais de l’environnement, l’initiative des poursuites appartient à l’administration des eaux et forêts, sans préjudice du droit qui appartient au ministère public ; en d’autres termes, les agents intervenant dans le domaine de l’environnement sont habilités à exercer des poursuites au même titre que les magistrats du parquet ; il s’agit notamment du secrétaire général, des directeurs centraux et des directeurs régionaux de l’administration des eaux et forêts qui ont le droit d’exposer l’affaire devant le tribunal et sont entendus à l’appui de leurs conclusions et siègent à découvert à la suite du Procureur de la République et de ses substituts (article 71 de la loi 48/83 ci-dessus citée). Notons que pour les infractions commises en matière de pêche maritime, c’est le procureur de la république seul qui a l’initiative des poursuites.
III-Les aspects répressifs du droit pénal de l’environnement
Nous avons dit plus haut que les lois relatives à la protection de l’environnement comportent des dispositions répressives qui répriment les comportements irréguliers face aux prescriptions administratives (autorisations, permis etc.) mais aussi à certaines interdictions définies comme étant des infractions.
Les pénalités en matière environnementale sont très nombreuses et variées ; Elles sont très sévères dans certains domaines susceptibles de porter gravement atteinte à la vie par exemple en ce qui concerne le régime des déchets nucléaires et les déchets industriels dangereux dont les peines sont de 10 à 20 ans de réclusion et d’une amende de 10 millions de francs Cfa à 50 millions francs Cfa qui sont les peines les plus lourdes prévues en droit pénal de l’environnement qui, de manière générale, accorde une large place aux peines pécuniaires, bien que parfois interviennent, dans de rares cas, des peines privatives de liberté.
La faiblesse du nombre de procédures judiciaires
Des enquêtes menées auprès des juridictions nationales, il en résulte la quasi inexistence d’affaires environnementales portées devant le juge répressif.
Les quelques rares affaires portées devant les tribunaux ont donné lieu à une application très souple de la loi ;
Dans la plus part des cas, ce sont des peines symboliques qui ont été prononcées, surtout en matière de chasse où les tribunaux évoquent souvent la nécessité pour les populations de se nourrir. Il est à noter que les administrations concernées par la protection de l’environnement n’ont jamais interjeté appel de quelle que décision que ce soit, adhérant ainsi implicitement à la thèse de l’utilité sociale et économique des actes prohibés.
LA TRANSACTION
L’usage excessif de la transaction explique la quasi inexistence des procédures judiciaires ; en effet la législation en vigueur dans le domaine de l’environnement, reconnaît aux administrations concernées, le droit de transiger avec les infracteurs ; ce recours systématique à la transaction s’explique également par le fait que les revenus ainsi récoltés donnent lieu à une ristourne au bénéfice des administrations concernées et aux personnes ayant concouru à la constatation de l’infraction par le Trésor Public ;
Le droit pénal de l’environnement de la république du Congo qui comporte essentiellement des sanctions pécuniaires, est très peu appliqué par les tribunaux répressifs du fait de l’usage excessif du droit de transiger dont disposent les différentes administrations qui concourent à la protection de l’environnement ; une action non moins efficace serait l’éducation des populations quant à l’importance qu’il y a à préserver leur cadre de vie, puisque la Constitution en vigueur fait de la protection de l’environnement l’affaire de tous les citoyens.